AMBIDEXTRE, adj. et subst.
A.− PHYSIOL. (Celui, celle) qui use indifféremment de ses deux mains, avec une égale facilité : 1. La question relative aux ambidextres, ou à la préférence d'une main sur l'autre, n'a point encore assez occupé les naturalistes : il est donc important d'examiner si les peuples que l'on visitera, se servent également de leurs deux mains pour le travail, ou bien s'ils en emploient une de préférence, et si la prééminence de la droite, chez les nations policées, n'est que l'effet du préjugé.
Voyage de La Pérouse autour du monde,1797, p. 182.
2. Faites passer rapidement sous le pouce de la main droite, − ou bien sous celui de la main gauche, si vous êtes scœve ou gaucher, − ou même sous celui des deux mains qu'il vous plaira d'employer, si vous êtes ambidextre, faites-y passer, dis-je, en rétrogradant, les feuillets que vous venez de parcourir.
Ch. Nodier, La Fée aux miettes,1831, p. 67.
3. Pour suivre les prescriptions du manuel, ils tâchèrent de devenir ambidextres, jusqu'à se priver de la main droite, temporairement.
G. Flaubert, Bouvard et Pécuchet,t. 2, 1880, p. 65.
B.− Au fig., rare. (Individu) qui déploie toutes les ruses de la duplicité pour parvenir à ses fins : 4. − Et Rousseau? Monsieur De Rivarol.
− Oh! Pour celui-là, c'est une autre affaire. C'est un maître sophiste qui ne pense pas un mot de ce qu'il dit ou de ce qu'il écrit, c'est le paradoxe incarné, (...) il a des cris et des gestes dans son style, et son éloquence épileptique a dû être irrésistible sur les femmes et les jeunes gens. Orateur, ambidextre, il écrit sans conscience, ou plutôt il laisse errer sa conscience au gré de toutes ses sensations et de toutes ses affections.
Ch.-J. de Chênedollé, Extraits du journal,1822, p. 116.
5. Quelle belle chose d'être ambidextre, c'est-à-dire à la florentine et à la française en même temps.
Stendhal, Correspondance,t. 2, 1842, p. 163.
6. ... elle [Léontine] sut manœuvrer dans les emplois subalternes avec tant d'art et de si ambidextres complaisances, qu'elle se faufila, s'installa...
L. Bloy, Histoires désobligeantes,1894, p. 24.
DÉR. Ambidextrie , subst. fém.physiol. Aptitude à user indifféremment des deux mains, avec une égale facilité (attesté ds Guérin 1892, Lar. encyclop);(cf. A. David, La Cybernétique et l'humain, 1965, p. 114).
ambidextérité Synon. de ambidextrie(attesté ds Ac. Compl. 1842, Besch. 1845, Lar. 19e, Nouv. Lar. ill.)semble tomber en désuétude au profit de ambidextrie;
ambidextralité (Piéron 1963).
Prononc. ET ORTH. : [ɑ
̃bidεkstʀ
̥]. Passy 1914 note une durée mi-longue pour la 1resyllabe du mot. − Dér. Ambidextérité. Guérin 1892 emploie comme vedette les formes : ambidextrie ou ambidextérité.
Étymol. ET HIST. − 1547 « qui se sert également bien des deux mains » (Budé, Instit. du Prince, éd. J. Foucher, ch. 27 ds Hug. : Es propriétés et droictures naturelles et morales, qui ont grande discrepance et disconvenance avec les Politiques et civiles, sinon qu'ilz soyent corrigés et attemperées par hommes meslés et ambidextres, qui s'aydent de deux mains).
Empr. au b. lat. ambidexter attesté au même sens dep. l'Itala, Iud., 3, 15 ds TLL s.v., 1837, 55.
− Ambidextérité, 1848, Ac. Compl. 1842. Ambidextrie, 1892, supra.
STAT. − Fréq. abs. litt. : 6.
BBG. − Bél. 1957. − Boiss.8. − Bouillet 1859. − Fér. 1768. − Foulq.-St-Jean 1962. − Lafon 1963 (s.v. ambidextrie). − Lav. Diffic. 1846. − Littré-Robin 1865. − Nysten 1824. − Piéron 1963 (s.v. ambidextrie). − Prév. 1755. − Sill. 1965 (s.v. ambidextrie).