a) Vx. [En parlant de l'aspect extérieur (vêt., coiffure, visage) d'une pers.] :
1. ... ma tignasse se hérisse comme une broussaille. Oh! Je suis bien laide, n'est-ce pas?
− Non, chère petite, répondit Isabelle, que cette admiration naïve touchait malgré elle, tu as ta beauté aussi; il ne te manque que d'être un peu accommodée pour valoir les plus jolies filles.
− Tu crois : pour être brave, je volerai de beaux habits, et alors Agostin m'aimera. »
T. Gautier, Le Capitaine Fracasse,1863, p. 387.
2. Devant l'apparition de beauté, rehaussée par toutes les élégances de la toilette, Marie se sentit condamnée, si chétive, à son propre jugement, que toute velléité de lutte l'abandonna. Elle eut un regard navré sur elle-même, dans la glace où elle se vit passer, avec sa pauvre petite robe de chez Madame Lafargue, la bonne faiseuse, avec sa coiffure accommodée selon les principes d'Eauze, de M. Mamousse, le coiffeur de la grand-rue.
E.-M. de Vogüé, Les Morts qui parlent,1899, p. 406.
3. Voici le point de vue raisonnable d'une correspondante : « Eh! monsieur, si le maquillage, en France, a tant de ferventes, c'est parce qu'il plaît aux hommes. Que deux personnes, l'une « nature », l'autre accommodée à la Jézabel, se présentent pour solliciter un emploi... c'est celle qui est camouflée qui aura le plus de chance de réussir. » (G. de La Fouchardière).
L'Œuvre,30 mars 1941.
− Loc. (vx). Être mal accommodé. Être mal coiffé, mal vêtu.
−
P. ext. Blessé : 4. Les journaux m'apprennent qu'on a lancé une bombe en pleine chambre législative. Une cinquantaine de blessés, dont le plus mal accommodé est un prêtre, l'abbé Lemire, nouveau député, qui aurait mieux fait de s'occuper des âmes.
L. Bloy, Journal,1893, p. 97.
−
P. antiphrase. Bien, proprement accommodé. Blessé : 5. − Au bras! Ce n'est rien; et l'autre?
− Je crois l'avoir touché.
(...)
− Voilà, dit-il, ce que j'appelle un homme proprement accommodé.
− Vit-il encore? demanda Orso respirant avec peine.
− Oh! Il s'en garderait, il a trop de chagrin de la balle que vous lui avez mise dans l'œil. Sang de la Madone, quel trou!
P. Mérimée, Colomba,1840, p. 138.
b) Vieilli. [En parlant d'une demeure] :
6. Elle se tenait dans une chambre, qui, pour être de construction à peu près européenne, n'en était pas moins meublée et accommodée à la tatare. À la vérité on voyait pendre sur les murailles, blanchies à la chaux, des cadres dorés contenant des gravures coloriées (...); mais à part ces emprunts à un luxe exotique, le tapis jeté sur le sol était persan, et le long des murs s'étendaient des petits matelas étroits...
J.-A. de Gobineau, Nouvelles asiatiques,La Danseuse de Shamakha, 1876, p. 32.
7. C'était trop loin pour qu'il pût distinguer les bâtiments pressés là-haut, la ferme où gîtaient cette nuit Berlaisier et Sarcelotte, la maison des gardes, et celle du comte de Remilleret, une ancienne ferme vaste comme une caserne, accommodée en demeure de maître.
M. Genevoix, Raboliot,1925, p. 71.
c) [En parlant d'un mets] :
8. ... ces oiseaux écorchés, et accommodés avec une sauce piquante, étaient à peu près aussi bons que les macreuses qu'on mange en Europe.
Voyage de La Pérouse autour du monde,t. 2, 1797, p. 45.
9. Il aime les fleurs, les friandises, les anguilles en gelée, mangées dans un bol sur le trottoir, le colin frit, les gros morceaux de viande et repousse les restes accommodés économiquement en ragoût, qu'il traite de « mess », de sale bouillie.
P. Morand, Londres,1933, p. 84.
−
Au fig. : 10. ... puisque nous sommes dans la salle des C, voyons les Benjamin Constant, de l'Orient ensoleillé à Batignolles-Clichy et accommodé à grand ragoût de teintes vives pour en masquer la saveur fade.
J.-K. Huysmans, L'Art moderne,1883, p. 87.
11. ... quel beau scandale s'il était jamais convaincu de faux témoignage! Accommodé à la sauce gaulliste ou à la sauce communiste, ça ferait un plantureux ragoût.
S. de Beauvoir, Les Mandarins,1954, p. 476.