1. Vertu spirituelle qui est l'amour parfait venant de Dieu et dont Dieu est l'objet, lien d'unité intime entre Dieu et les hommes, créatures de Dieu : 1. Que dirons-nous maintenant de cette charité fille, de J. C., qui signifie au sens propre, grace et joie? La religion voulant reformer le cœur humain, et tourner au profit des vertus nos affections et nos tendresses, a inventé une nouvelle passion : elle ne s'est servie pour l'exprimer, ni du mot d'amour qui n'est pas assez sévère, ni du mot d'amitié, qui se perd au tombeau, ni du mot de pitié, trop personnel et trop voisin de l'orgueil; mais elle a trouvé l'expression de caritas, charité, qui renferme les trois premières, et qui tient en même temps à quelque chose de céleste. Par-là, elle a dirigé nos penchans vers le ciel, en les épurant et les reportant au Créateur; par-là, elle nous enseigne cette vérité merveilleuse, que les hommes doivent, pour ainsi dire, s'aimer à travers Dieu qui spiritualise leur amour et n'en laisse que l'immortelle essence, en lui servant de passage.
Chateaubriand, Génie du Christianisme,t. 1, 1803, p. 90.
2. Ce saint homme ne faisait rien d'extraordinaire, mais il était tout pénétré de charité. (...) En lui se réalisait vraiment ce qu'a dit saint Paul : « Quand je parlerais les langues des hommes et des anges, si je n'ai pas la charité, je suis un airain qui sonne ou une cymbale qui retentit. Quand j'aurais le don de prophétie, que je connaîtrais tous les mystères et posséderais toute science, quand j'aurais même toute la foi, jusqu'à transporter des montagnes, si je n'ai pas la charité, je ne suis rien. Quand je distribuerais tous mes biens pour la nourriture des pauvres, quand je livrerais mon corps aux flammes, si je n'ai pas la charité, tout cela ne me sert de rien. La charité est patiente, elle est bonne. La charité n'est point envieuse, la charité n'est point inconsidérée, elle ne s'enfle point d'orgueil, elle ne fait rien d'inconvenant, elle ne cherche point son intérêt, elle ne s'irrite point, elle ne tient pas compte du mal, elle ne prend pas plaisir à l'injustice, mais elle se réjouit de la vérité. Elle excuse tout, elle croit tout, elle espère tout, elle supporte tout. La charité ne passera jamais... (...) [I. Cor., XIII, 1-8].
Billy, Introïbo,1939, p. 213, 214.
3. La Mère Angélique Arnauld (...) disait qu'en enfer, les âmes (...) souffrent grandement de la solitude, parce que là où il n'y a pas de charité, il n'y a pas d'union entre les âmes, et il n'y a pas d'amour en enfer.
Green, Journal,Le Bel aujourd'hui, 1955-58, p. 182.
a) Amour de Dieu pour l'homme. Dieu est charité, et puisqu'il aime ses créatures, pourquoi ne les aimerions-nous pas comme lui? (Claudel, Feuilles de Saints,1925, p. 645):4. ... nous ne sentons la distance que vers le bas. Il est beaucoup plus facile de se mettre par l'imagination à la place de Dieu créateur qu'à la place du Christ crucifié. Les dimensions de la charité du Christ, c'est la distance entre Dieu et la créature. La fonction de médiation, par elle-même, implique l'écartèlement... C'est pourquoi on ne peut concevoir la descente de Dieu vers l'homme ou l'ascension de l'homme vers Dieu sans écartèlement.
S. Weil, La Pesanteur et la grâce,1943, p. 94.
b) Amour désintéressé des hommes pour Dieu considéré comme le Bien suprême, la perfection : 5. ... l'âme désire recouvrer sa ressemblance plénière à Dieu et à elle-même en éliminant la dissemblance qui la sépare à la fois de l'un et de l'autre. Elle ne le peut que par la charité et par la grâce. Or, recouvrer la charité, ce n'est pas seulement redevenir semblable à Dieu, donc à soi-même, c'est encore, puisque l'âme se connaît et se voit intimement elle-même, voir Dieu dans l'image enfin restaurée par la grâce et où il se mire désormais avec complaisance.
Gilson, L'Esprit de la philos. médiév.,t. 2, 1932, p. 92.
♦ Acte de charité. Prière exprimant cette attitude de l'âme envers Dieu (cf. acte, ex. 18).
2. Amour surnaturel du prochain, des hommes entre eux, considérés comme fils d'un même Père : 6. La loi de justice enseigne que tous sont égaux devant leur père qui est Dieu, et devant leur seul maître qui est le Christ. La loi de charité leur apprend à s'aimer et à s'entr'aider comme les fils d'un même père et les disciples d'un même maître.
Lamennais, Les Paroles d'un croyant,1834, p. 258.
7. ... vous pratiquerez la charité dans ce qu'elle a de plus élevé, vous expierez pour les autres, vous prierez pour ceux qui ne prient point, vous aiderez, dans la mesure de vos forces, à compenser la haine que le monde porte au Sauveur.
Huysmans, En route,t. 1, 1895, p. 207.
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En partic. Amour des malheureux : 8. hauviette [à Jeannette]. − (...) On s'imagine ici, dans la paroisse, que tu es heureuse de ta vie parce que tu fais la charité, parce que tu soignes les malades et que tu consoles ceux qui sont affligés; et que tu es toujours là avec ceux qui ont de la peine. Mais moi, moi Hauviette, je sais que tu es malheureuse.
Péguy, Le Mystère de la charité de Jeanne d'Arc,1910, p. 16.
9. − (...) Je ne reconnais qu'une charité chrétienne, mon jeune camarade, et c'est celle qui procède directement de Jésus, (évangiles, passim,) ou plutôt ubique : c'est la constante communion, et spirituelle, et temporelle, avec le pauvre, avec le faible, avec l'opprimé.
Péguy, L'Argent,1913, p. 1201.