a) Donner libre cours à une force latente ou à un sentiment contenu, d'ordre individuel ou collectif. Déchaîner le rire, le tumulte, l'enthousiasme, les passions. Ce bon ivrogne et ce cadet de Gascogne sont naturels. Ils déchaînent la sympathie (Barrès, Cahiers,t. 5, 1906-07, p. 161):3. Il passait par des roulades, d'un air à l'autre, à peu près immobile, n'avançant la tête qu'au refrain. Alors il battait la mesure, déchaînait le tumulte, et tandis qu'il chantait encore je le voyais sourire si toutes les voix couvraient enfin le bruit de ferraille que faisait le train.
Guéhenno, Journal d'un homme de 40 ans,1934, p. 152.
− Spéc., péj. Déclencher avec force un événement généralement défavorable. Quand elle [la bourgeoisie] aura déchaîné les événements, quand elle aura ouvert la crise (Jaurès, Ét. soc.,1901, p. XVII).Déchaîner une nouvelle guerre (Green, Journal,1946, p. 64).
− Emploi pronom. [Le suj. désigne un inanimé abstr.] Toutes les passions s'étaient déchaînées, balayant les hommes et les choses (Zola, Travail,t. 2, 1901, p. 121).
b) [Le compl. désigne un élément de la nature] Libérer brusquement et avec violence une force naturelle. Déchaîner les vents, la tempête. [Cette force] qui déchaîne les vents, soulève les mers ou calme les tempêtes (Dupuis, Orig. cultes,1796, p. 6):4. L'hiver vint, l'ouragan que la saison déchaîne,
S'engouffrant une nuit dans les branches du chêne,
Et le combattant, seul, sans frère et sans appui,
Le balaya de terre et son ombre avec lui; ...
Lamartine, Jocelyn,1836, p. 751.
− Emploi pronom. Se manifester dans toute sa violence. La tempête se déchaîne, les vents sifflent, les vagues grondent et les voiles sont déchirées (Staël, De Allemagne,t. 2, 1810, p. 146).