DÉCHIFFRER, verbe trans.
A.− Traduire en clair un texte chiffré. Déchiffrer un cryptogramme. Déchiffrer un document cryptographique, c'est chercher ce qui dans ce document demeure invariant, quand on en permute les lettres (Poincaré, Valeur sc.,1905, p. 247).− P. anal. Interpréter des signes difficiles à comprendre, ou une écriture constituée de tels signes. Déchiffrer des hiéroglyphes. Il ne savait déchiffrer une carte (Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 294).
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P. ext. Lire un texte écrit dans des caractères inconnus du profane : 1. − Tiens! Clotilde, finit-il par dire, tu recopieras cette note. Jamais Ramond ne déchiffrerait ma satanée écriture.
Zola, Le Docteur Pascal,1893, p. 8.
♦ [Suivi d'une complétive] Une inscription très effacée où je déchiffre qu'il est mort en ce lieu à cinquante-huit ans (T'Serstevens, Itinér. esp.,1963, p. 241).
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Spéc., MUS. Lire (et jouer) une partition qu'on voit pour la première fois. Il déchiffra sur son piano tout un acte de Don Juan (Stendhal, Armance,1827, p. 34).Une partition musicale que je déchiffre, que j'exécute (Gide, Ainsi soit-il,1951, p. 1215).♦
Emploi absolu : 2. Il ouvrit son secrétaire, en tira un cahier de musique, le mit sur le pupitre du piano, et dit à l'enfant de jouer. Christophe, très intrigué, déchiffra tant bien que mal.
Rolland, Jean-Christophe,L'Aube, 1904, p. 84.
♦ P. métaph. Virgile. Certains passages ardus à déchiffrer. Je veux arriver à le relire du moins couramment (Gide, Journal,1944, p. 278).
B.− Au fig. Comprendre quelque chose d'obscur, de mystérieux ou de secret. Je ressentais, mais ne pouvais déchiffrer le mystère de ce regard souriant qu'elle adressait à ses amis (Proust, Guermantes 1,1920, p. 53).L'impression que ma misérable petite vie a un sens, (...) qu'elle pourrait être déchiffrée, que je finirai par comprendre (Mauriac, Mal Aimés,1945, III, 2, p. 231):3. Elle n'arrivait pas à déchiffrer mon nouveau visage, s'entêtant à en chercher la clef, comme autrefois quand je riais toujours, dans mes yeux et dans mes dents...
Giraudoux, Siegfried et le Limousin,1922, p. 91.
♦ [Le compl. d'obj. désigne une pers.] Une vieille femme, difficile à déchiffrer à première vue dans les oripeaux sales (Aragon, Beaux quart.,1936, p. 319).
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P. ext. Se rendre compte d'une chose difficile à déceler : 4. Ces sentiments embryonnaires de révolte, de rancune, de défi, d'orgueil concentré et solitaire, qu'il avait déchiffrés au passage dans le regard de Jean-Paul, il les reconnaissait : il les avait maintes fois surpris dans les yeux de son frère.
Martin du Gard, Les Thibault,Épilogue, 1940, p. 869.
♦ [Suivi d'une complétive] C'était une journée pareille à toutes les autres et personne ne déchiffrait sur son visage qu'il venait de se parjurer (Beauvoir, Mandarins,1954, p. 478).
Prononc. et Orth. : [deʃifʀe], (je) déchiffre [deʃifʀ]. Fér. Crit. t. 1 1787 : déchifrer. Ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. Ca 1467 « comprendre, expliquer quelque chose d'obscur, de secret » (G. Chastellain, Chronique, 1. 6, 3epartie, 10e§, éd. J. Kervyn de Lettenhove, t. 5, p. 235); 2. a) 1559 « décrypter (un texte codé) » (Ronsard, Second livre des mélanges, éd. P. Laumonier, t. 10, p. 41, vers 63); b) 1671 « lire (une écriture difficile à lire) » (Mmede Sévigné, Lettres, 5 juill., éd. M. Monmerqué, t. 2, p. 266); c) 1754 « lire (une écriture inconnue) » (Encyclop. t. 4); 3. 1761 mus. (J.-J. Rousseau, Nouvelle Héloïse, I, 52,
Œuvres complètes, éd. H. Coulet et B. Guyon, t. 2, p. 144). Dér. de chiffre*; préf. dé-*; dés. -er. Fréq. abs. littér. : 562. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 396, b) 697; xxes. : a) 663, b) 1 276. Bbg. Lire le dict. Actual. terminol. 1972, t. 5, no1, p. 2.