1. Domaine
phys.Agrandir, augmenter la surface, l'étendue (d'un espace, d'un terrain, d'une propriété). Le paysan élargit la terre qu'il laissera derrière lui (Faure, Espr. formes,1927, p. 140).Quel repos d'avoir élargi sur la carte les espaces où l'on n'a plus souci d'aller voir! (Gide, Journal,1939-49, p. 416).− P. méton. [Le compl. désigne une pers.; l'idée est celle de mettre dans un espace plus grand] Mettre en liberté, relâcher. Selon la tournure que prendront les affaires, on élargira la prison ou les prisonniers (Courier, Pamphlets pol.,1823, p. 178).
2. Au fig. Rendre plus vaste le domaine d'une activité, d'un phénomène ou d'un ensemble de phénomènes; accroître son étendue ou sa portée, lui faire embrasser un plus grand nombre de choses. a) [En parlant d'un phénomène social] Élargir le cercle de ses amis, de ses lecteurs, de la famille. C'est une raison pour élargir la société au delà de la famille (Alain, Propos,1910, p. 84).M. Paul Reynaud, dans son désir d'élargir son infime majorité (De Gaulle, Mém. guerre,1954, p. 26).
b) [En parlant d'un phénomène propre à la vie individuelle] Élargir le champ de l'imagination, de la sensibilité; élargir ses connaissances, son horizon, ses vues; élargir le cœur, l'esprit, la vie; élargir le débat. On peut avoir le désir d'élargir sa vie morale en dehors de Dieu (Psichari, Voy. centur.,1914, p. 176).Cet altruisme objectif (...) qui est le goût d'élargir et d'intensifier son action sur autrui (Mounier, Traité caract.,1946, p. 245):2. ... j'ai peine à monter, à étendre l'amour, à élargir mon cœur pour y comprendre l'amour universel. Eux, ils sont garrottés, les uns de formules, les autres de légendes.
Michelet, Journal,1850, p. 128.
3. Il lui semblait que la plupart pensaient d'une façon sommaire, étroite, complaisamment intolérante et haineuse; que leur intelligence s'appliquait systématiquement à renforcer leurs conceptions, non à les élargir, à les renouveler; ...
Martin du Gard, Les Thibault,L'Été 1914, 1936, p. 71.
Rem. On rencontre ds la docum. l'emploi adj. du part. prés. Qui élargit, rend plus large, plus vaste. Dans l'attitude si optimiste, si élargissante, dont nous venons d'esquisser les traits, un véritable et profond renoncement est partout dissimulé (Teilhard de Ch., Milieu divin, 1955, p. 63).
c) [En parlant d'un phénomène extérieur à l'individu] Élargir un concept, une notion. Elle cherchait l'écho de la parole consolatrice dont elle élargissait le sens à l'infini (Mauriac, Th. Desqueyroux,1927, p. 210).Le parti qu'il a su tirer de la fugue, pour élargir, sans la modifier dans son essence, la forme du développement de la sonate (Rolland, Beethoven,t. 1, 1937, p. 136).− [En parlant d'une contrainte morale] Rendre plus lâche, moins rigoureuse. − Aussi est-on, parfois, obligé d'élargir un peu la règle et lorsqu'un moine tombe en faiblesse, on ne lui refuse pas un morceau de pain (Huysmans, En route,t. 2, 1895, p. 103).