a) Espérer qqn−
Vieilli et région. (Picardie, Ouest, Midi de la France, Québec). Attendre l'arrivée, la venue de quelqu'un; attendre sa présence. Mon frère espère une épouse, et ma sœur un mari (Crèvecœur, Voyage,t. 1, 1801, p. 154).Certaines gens, pour une commission, l'attendaient [le facteur] au coin des routes; d'autres « l'espéraient » aux points fixes qu'on lui connaissait (La Varende, Normandie en fl.,1950, p. 40):1. Nous prîmes à travers champ pour gagner Théotime. Françoise nous attendait à la limite. Elle nous dit :
− On vous espère à la métairie. C'est midi sonné.
Bosco, Mas Théot.,1945, p. 208.
−
Rare. Espérer qqn + attribut.Prêter à quelqu'un une qualité probable, avec une nuance intérieure de doute ou d'interrogation. Edmond, si vous saviez toutes les prières que j'ai adressées pour vous à Dieu, tant que je vous ai espéré vivant et depuis que je vous ai cru mort (Dumas père, Monte-Cristo,t. 2, 1846, p. 430).Moi, je travaille en vous espérant pour lecteur. Un grand esprit, c'est un public. Votre applaudissement me paie (Hugo, Corresp.,1868, p. 113).♦ Emploi pronom. MmeÉterlin s'espérait encore désirable et désirée (Druon, Gdes fam.,t. 2, 1948, p. 233).
b) Espérer qqc.−
Vieilli et région. Synon. de attendre qqc.Espérez un peu que la nuit vienne! (Claudel, Part. midi,1949, I, p. 1073).♦ Absol. − Après? dit Groult en fronçant les sourcils. − Espérez un peu, dit le Normand dans son patois, espérez (France, Jocaste,1879, p. 102).Il me déclara qu'il avait à me montrer quelque chose... mais là, quelque chose... Espérez un brin! − Et il appela (Feuillet, Scènes et prov.,1851, p. 339).
− S'attendre à quelque chose de manière intuitive; s'imaginer qqc. [Ne cherchez pas là] les nuances de bistre et de vieille pipe qu'un peintre pourrait espérer : tout est blanchi à la chaux selon l'usage arabe (Gautier, Tra los montes,1843, p. 18).J'ouvris le carnet et fus d'abord déçu : j'espérais un roman, des contes (Sartre, Mots,1964, p. 87).
− Attendre avec confiance un bien que l'on désire; considérer comme possible et probable sa réalisation; considérer comme certaine une chose dont on n'est pas scientifiquement, objectivement sûr. Espérer un miracle, la paix, le salut. Ma cousine (...) me laisse espérer un généreux pardon (Sénac de Meilhan, Émigré,1797, p. 1736).Le lord de la trésorerie : − Jamais entrevue ne fut plus désirée. Richard : − Vous y comptiez? Le lord de la trésorerie : − Nous l'espérions (Dumas père, Richard Darlington,1832, II, 2, p. 96).L'expression d'attente anxieuse du dieu Tlaloc, espérant la pluie comme un pauvre homme dont le soleil a calciné le champ (Faure, Espr. formes,1927, p. 118).
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Entrevoir la possibilité de quelque chose; escompter, logiquement et par voie de conséquence, quelque chose. La vue, à chaque instant, est arrêtée par des monts qui laissent à peine espérer un défilé (Dusaulx, Voy. Barège, t. 2, 1796, p. 57).La nuit (...) était trop inquiétante pour laisser espérer un départ à l'aube (Peyré, Matterhorn,1939, p. 255):2. Les bilans et les programmes d'emploi des énergies, de prospection et de mise en œuvre des sources de matières premières, font espérer l'augmentation des « ressources naturelles » disponibles, grâce à la communication des informations et à la coordination des prévisions et des intentions des producteurs et des pouvoirs publics.
Perroux, Écon. XXes.,1964, p. 560.
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Espérer qqc. de qqc., espérer qqc. de qqn.Escompter la réalisation de ce que l'on attend par l'action de quelqu'un ou de quelque chose. Que n'espérions-nous pas de sa jeune vertu! (Constant, Wallstein,1809, V, 9, p. 163).Cf. créosote ex. :
3. Le paysan est timide à côté [du marin]; il craint parce qu'il espère. Le marin a jugé cette masse fluide, évidemment sans projet et sans mémoire; et, parce qu'il ne peut espérer rien d'elle, il ne compte alors que sur lui-même.
Alain, Propos,1926, p. 685.