1. Caractère de la chose ou de la personne qui correspond, presque parfaitement, à la représentation idéale de sa nature, de sa fonction ou qui manifeste une très nette supériorité dans tel ou tel domaine. a) Domaine
gastr.Tout gourmet se délecte aujourd'hui, dans les restaurants renommés par l'excellence de leurs caves (Huysmans, À rebours,1884, p. 29).Il connut l'excellence de leur foie et la finesse de leur graisse [des oies et des canards]. Car ils sont renommés autant l'un que l'autre pour ce relief incomparable et cette substance fondante, succulente (Pesquidoux, Livre raison,1925, p. 152):1. Nous entendons par éprouvettes gastronomiques, des mets d'une saveur reconnue et d'une excellence tellement indisputable, que leur apparition seule doit émouvoir, chez un homme bien organisé, toutes les puissances dégustatrices...
Brillat-Sav., Physiol. goût,1825, p. 165.
b) Domaine techn., pratique.Ce juste rapport entre le volume des organes et leur énergie respective, constitue l'excellence de l'organisation; il produit le sentiment du plus grand bien-être (Cabanis, Rapp. phys. et mor.,t. 1, 1808, p. 364).Le climat est bon, ici (...) la température égale, la flore aromatique, les eaux salubres de nos coteaux sont d'une excellence absolue pour la guérison des affections de poitrine (Zola, Conquête Plassans,1874, p. 1157).L'excellence de votre installation, l'ordre méticuleux qui y règne et le modernisme du moindre détail (Romains, Knock,1923, II, 3, p. 10).
c) Domaine des
activités hum. en gén.Il proteste de l'excellence des juges, de leur parfaite honorabilité (Gide, Journal,1933, p. 1188):2. ... « il paraît qu'il y a dans un couvent de Paris un jardinier excellent, qui est un saint homme, appelé Fauvan ». Rien de tout ce triomphe ne parvint jusqu'à Fauchelevent dans sa baraque; il continua de greffer, de sarcler, et de couvrir ses melonnières, sans être au fait de son excellence et de sa sainteté.
Hugo, Misér.,t. 1, 1862, p. 674.
d) Domaine des arts.Ce palais est remarquable par la singularité, la hardiesse et la magnificence de son ensemble architectural, autant que par l'excellence de ses détails (Ménard, Hist. B.-A.,1882, p. 37).
e) Domaine
intellectuel, littér.Excellence d'une œuvre. La querelle relative à l'excellence du théâtre britannique ou français se renouvelle. (...) on arrivera à ce point d'être convaincu que chaque nation a une manière de s'amuser qui lui est particulière et susceptible d'un degré de perfection relatif (Delécluze, Journal,1827, p. 468).On peut calculer la valeur d'un homme d'après le nombre de ses ennemis et l'importance d'une œuvre au mal qu'on en dit. (...) Ce blâme envoyé par Sainte-Beuve à la « Paysanne » me confirmerait plus dans l'excellence de la « Paysanne » que les éloges du grand Hugo (Flaub., Corresp.,1853, p. 237):3. [Racan] eut de la raison et du goût éminemment. Dans ses ouvrages, tout est de choix, rien de nécessité; et c'est là ce qui constitue son excellence.
Joubert, Carnets,Paris, Gallimard, 1938 [1807], p. 610.
−
Prix d'excellence. Prix remis en fin d'année à l'élève qui s'est montré supérieur aux autres dans la maîtrise des matières enseignées : 4. ... j'étais, moi aussi, un très bon élève. Et j'étais content parce que j'allais recevoir, comme on recevrait un beau lingot d'or, le prix d'excellence de ma classe. C'était un important point de repère dans la vie, ce prix d'excellence : grâce à lui, on avait la certitude d'avoir fait très bien; quand on l'avait, on n'avait pas besoin de regarder plus haut; on était arrivé.
Larbaud, F. Marquez,1911, p. 207.
♦ P. méton. Personne qui a reçu ce prix ou livre qui symbolise ce prix. Les philosophes (...) n'étaient que deux. L'un, nécessairement, avait le premier prix d'excellence, et l'autre le second. (...) Mais l'équilibre exigeait que le second prix d'excellence obtînt le premier prix de dissertation, et l'autre (évidemment) le deuxième. Et ainsi de suite... Ils redescendaient l'un et l'autre chargés de couronnes et de livres dorés (Valéry, Variété III,1936, p. 233).
f) Domaine
moral, relig., idéol.−
[À propos d'une valeur abstr.] Je soutiens l'excellence de l'inégalité qu'ils réprouvent (Fourier, Nouv. monde industr.,1830, p. 38).Le moindre prêtre de campagne (...) pense comme moi. Il soignerait la misère avant de vouloir en démontrer l'excellence (Camus, Peste,1947, p. 1320):5. La religion répond à des besoins, à des idées qui sont en moi et qu'il n'appartient pas à ma raison de faire taire. (...) Il me suffit qu'elle me vienne de mes ancêtres sans que je sache si elle me vient de Dieu. Ma courte expérience, mon expérience partielle a déjà vérifié l'excellence de la longue série d'expériences qu'ils ont résumées dans la religion.
Barrès, Cahiers,t. 7, 1909, p. 239.
−
[À propos d'une pers.] Jésus ne tarissait pas sur les mérites et l'excellence de son précurseur [Jean] (Renan, Vie Jésus,1863, p. 208):6. ... il faut, ou s'aimer tendrement soi-même, ou avoir quelque projet sérieux à faire réussir, pour s'attacher passionnément à repousser la calomnie qui atteint tous les hommes, même les meilleurs, et pour vouloir absolument prouver l'excellence de soi. (...) [Et], comme nul ne peut prouver qu'il ait atteint à la perfection, il faut laisser à ceux qui nous connaissent le soin de nous absoudre de nos travers et d'apprécier nos qualités.
Sand, Hist. vie,t. 1, 1855, p. 10.
♦ Absol. Passion de l'excellence ou de la prédominance : (...) l'amour ambitieux d'exceller, d'être le premier (Sainte-Beuve, Port-Royal,t. 2, 1842, p. 163).
♦ P. méton. Une/des excellence(s). Forme de supériorité morale. On expie toujours une excellence par quelque abaissement (Renan, Antéchrist,1873, p. 227).Nul ne conteste les misères de l'enfance; mais pourquoi laisser tristement dans l'ombre les excellences réelles, la séduction bienfaisante de cet âge? (Bremond, Hist. sent. relig.,t. 3, 1921, p. 522).
g) Domaine des
relations interpersonnelles, soc.Il m'a découvert et l'excellence de son caractère et la douceur de son âme (Balzac, Mém. jeunes mar.,1842, p. 214):7. ... je traversai la cour d'honneur avec l'intime satisfaction d'un bourgeois qui rentre chez lui. C'est là un effet de la bonté de mes hôtes, et l'impression que je ressentis alors sur leur seuil prouve mieux que tous les raisonnements l'excellence de leur hospitalité.
France, Bonnard,1881, p. 364.