1. [Le compl. d'obj. et le compl. prép. désignent des objets concr.] Un bouc se rencontre; on l'orne de fleurs et de lierre (Sainte-Beuve,Tabl. poés. fr.,1828, p.210).La voûte [de Santa Maria della Vittoria] fut ornée par Giovanni Domenico Perugino d'une fresque triomphale (Mâle,Art relig.,1932, p.37):1. Songeant qu'il lui faudrait prendre femme, choisir une demeure décente, il m'interrogeait sur les moyens de l'orner économiquement avec des reproductions des plus beaux ouvrages −et le jardin de statues, de vases, de colonnades, à l'imitation du parc Monceau.
Blanche,Modèles,1928, p.33.
♦ Vieilli. [Sans compl. prép.] Synon. décorer.Cinquante mille ouvriers travaillent jour et nuit à orner la capitale (Jouy,Hermite, t.1, 1811, p.62).Les moins distingués [des peintres] savent encore orner joliment un atelier, disposer des plâtres, des fleurs, faire de rien quelque chose (Taine,Notes Paris,1867, p.247).
♦ Au part. passé et/ou adj. Façade, porte ornée. Elle prit le moins orné des fusils (Mérimée,Colomba,1840, p.36).Le beau linge simple ou orné de dentelles et de broderie (Lar. mén.1926, p.752).
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[Constr. partic.] a) [Le compl. d'obj. désigne une partie du corps et p. méton. une pers.] Vieilli. Synon. parer.Madame Guillaume ornait habituellement sa tête (...) d'un bonnet (Balzac,Mais. chat,1830, p.16).♦ Empl. pronom. réfl. Que les femmes ne s'ornent pas pour d'autres que leurs maris présents ou futurs (A. France,Rabelais,1909, p.14).
♦ Empl. pronom. réfl. indir. [Le] rouge dont elles [les femmes] s'ornent le visage pour vous séduire (Boylesve,Leçon d'amour,1902, p.55).
b) [Le compl. d'obj. désigne un élément de la forme ou du contenu d'un message] Orner un discours de citations. Les hommes simples, qui sont toujours amoureux des merveilles, ornoient son histoire des épisodes les plus singuliers et les plus divers (Nodier,J. Sbogar,1818, p.101).Elle orne sa douleur de comparaisons: −Je suis comme une feuille qui tombe, qui tourbillonne et qui va à terre (Renard,Journal,1905, p.1017):2. Que sont tous ces discours lascifs ou mensongers, que vous ornez de votre mélodie et de tous les secrets de votre art? Je ne vois là encore que des sons qui attendent également d'être vivifiés par la parole.
Saint-Martin,Homme désir,1790, p.141.
♦ [Sans compl. prép.] Orner la vérité, des faits. Il semble être né exprès pour justifier le mot de Cicéron: «(...) Le comble et la perfection de l'éloquence, c'est d'amplifier le sujet en l'ornant et le décorant» (Sainte-Beuve,Caus. lundi, t.9, 1853, p.9).
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Part. passé et/ou adj., CRIT. LITTÉR. Qui est embelli par des figures de style, qui est produit par le travail du style. Discours, style orné. Ces jugements d'une concision ornée, laquelle fait, selon lui, la beauté unique du style (Sainte-Beuve,Portr. littér., t.2, 1838, p.315).Sans cesser d'être majestueux, il faudrait qu'il fût [ce vers] toujours simple et orné sans ornement (Quinet,Napoléon,1836, p.146).Empl. subst. masc. sing. à valeur de neutre. Chez lui, le châtié et l'orné font constamment partie du scrupule (Sainte-Beuve,Portr. contemp., t.4, 1846, p.287). c) MUS. Ajouter un élément à valeur d'ornement (v. ce mot II A 2 c). Orner une mélodie, un chant. Elle crut devoir orner le point d'orgue d'un long trille (Berlioz,Souv. voy.,1869, p.132).On peut orner, «fleurir» les notes du motif (Combarieu,Mus.,1910, p.71).♦ Part. passé et/ou adj. Le chant grégorien se contente d'une sorte de récitation ornée et expressive, exempte pourtant de toute sécheresse (Potiron,Mus. église,1945, p.22).
2. a) [Le compl. prép. désigne une qualité abstr.] Elle est venue chez les Charpentier, orner leur soirée de sa présence et de ses talents (Flaub.,Corresp.,1877, p.316).Cette maison que son beau-père et lui s'étaient plu à orner de toutes les vertus domestiques (Zola,Pot-Bouille,1882, p.343).− Part. passé et/ou adj. Synon. doué de.Dioclétien étoit un prince orné de modération et de sagesse (Chateaubr.,Martyrs, t.2, 1810, p.143).Vous êtes un jeune homme si parfaitement accompli et orné des dons du ciel, que je n'hésite pas à vous dire toute la vérité (Gobineau,Pléiades,1874, p.156).
b) [Sans compl. prép.] L'éducation ne consiste pas seulement à orner la mémoire et à éclairer l'entendement (Joubert,Pensées, t.1, 1824, p.445).[Les] établissements laïques où l'on orne les esprits sans former les âmes (Beauvoir,Mém. j. fille,1958, p.125):3. Je ne puis songer à une femme qui prend soin de se parer chaque jour, sans méditer la grande leçon qu'elle donne aux artistes. Elle s'habille et se coiffe pour peu d'heures, et c'est un soin qui n'est pas perdu. Nous devons, comme elle, orner la vie sans penser à l'avenir.
A. France,Lys rouge,1894, p.143.
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Part. passé et/ou adj., vieilli. Esprit orné. Esprit cultivé et policé. Béatrix joignoit à des talens enchanteurs et à l'esprit le plus étendu et le plus orné, cette aimable enfance de caractère (Genlis,Chev. Cygne, t.3, 1795, p.30).♦ [P. méton.] Ce dernier [un humaniste] était plus orné, plus fleuri, plus rhétoricien, plus de seconde main, que sais-je? Il était plus quartier-latin, il était moins attique (Sainte-Beuve,Nouv. lundis, t.12, 1868, p.364).
c) [P. méton.: le compl. prép. désigne une pers.] Les artistes dont j'aime à orner ma cour (Sand,Consuelo, t.3, 1842-43, p.209).