A. − Ensemble des arguments issus d'une réflexion, mis en œuvre dans une discussion, et qui ont pour but de convaincre quelqu'un ou de démontrer, de prouver quelque chose. Synon. argument(s), preuve(s), raison(s).On ne comprenait guère son désespoir, qu'on voulait calmer par des raisonnements (Murger, Scènes vie boh., 1851, p. 220).Il dut reprendre tout son raisonnement, pour se prouver son droit au meurtre, le droit des forts que gênent les faibles (Zola, Bête hum., 1890, p. 204).L'assentiment peut valablement survivre aux raisonnements qui l'ont provoqué (Lacroix, Marxisme, existent., personn., 1949, p. 100):2. Le défilé avait passé. Connaissant l'incroyance de Marie-Jeanne, Patrick l'avait vue avec stupeur esquisser, à l'approche du cercueil, le signe de la croix, par un de ces gestes où se décèle l'automatisme ancestral, déclenché par une émotion plus forte que tous les raisonnements.
Bourget, Actes suivent, 1926, p. 133.
SYNT. a) α) Ébaucher, bâtir, étayer, démolir un raisonnement; faire, se faire, monter, tenir (tout) un raisonnement; orienter, poursuivre, reprendre, retourner, suivre un raisonnement; mener à bien, aller au bout d'un/de son raisonnement; perdre le fil d'un raisonnement.
β) Combattre, soutenir un raisonnement; se rendre, souscrire à un raisonnement; entrer dans le raisonnement de qqn; n'écouter aucun raisonnement. b) Un raisonnement se tient, tient debout, s'enlise, s'écroule; un raisonnement ne mène à rien, échoue. c) Raisonnement imparable, impeccable, implacable, inattaquable, irréfutable; raisonnement captieux, fallacieux, scabreux, spécieux; raisonnement astucieux, audacieux, ingénieux, simpliste, hasardeux, dangereux; raisonnement bancal, boiteux, fragile, tortueux; raisonnement bâtard, bizarre, idiot, puéril, stupide, superficiel. d) Au plur.
α) Dévider des raisonnements; nourrir ses raisonnements de qqc.; se livrer à des raisonnements interminables; user de tous les raisonnements (pour arriver à ses fins); épuiser tous les raisonnements (pour se rassurer); répondre à des raisonnements.
β) Accumulation de raisonnements; chaîne, cours, dédale, trame des raisonnements; raisonnements contradictoires, décousus, futiles, impuissants, inutiles, pompeux; de vieux raisonnements rebattus; de beaux raisonnements stériles.
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Loc. et expr. ♦ Au sing. [Dans des propos rapportés au style dir., sert à exprimer le doute que l'on a sur la valeur de l'argumentation d'un interlocuteur] Ce n'est pas un raisonnement (Rob.).
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Au plur. (Faire) des raisonnements à perte d'haleine ou à perte de vue. ,,Faire des raisonnements vagues qui ne concluent à rien`` (Ac.). [Dans des propos rapportés au style dir., sert à exprimer l'irritation provoquée par les répliques, les objections répétées de l'interlocuteur] Point tant (ou pas tant) de raisonnements! (Ac.). Épargnez-nous vos raisonnements (Rob.). B. − Notamment en log. et dans le lang. sc. Suite logique de propositions aboutissant à une conclusion. Mettre en forme, construire un raisonnement; portée d'un raisonnement; raisonnement vrai, défectueux, concluant, absurde. Maxwell, dans son raisonnement sur les aimants, a calculé seulement le travail des forces magnétiques proprement dites (H. Poincaré, Électr. et opt., 1901, p. 398).[D'après Aristote] il est possible de réduire tout raisonnement correct à l'application systématique d'un petit nombre de règles immuables (Bourbaki, Hist. math., 1960, p. 13).V.
conclusion ex. 8:
3. ... un raisonnement est toujours une série de jugemens qui s'enchaînent de manière que l'attribut du premier devient le sujet du second, et ainsi de suite ...
Destutt de Tr., Idéol. 3, 1805, p. 346.
− Au plur. [S'oppose à sensations, émotions] Synon. de spéculations.Ses yeux exprimaient cette exaltation naïve devant la beauté de la nature, privilège des cœurs restés simples qui ne se retrouve pas quand on s'est desséché l'âme à force de raisonnements, de théories abstraites et de lectures (Bourget, Disciple, 1889, p. 126).