1. a) Fait de se servir de quelque chose, d'appliquer un procédé, une technique, de faire agir un objet, une matière selon leur nature, leur fonction propre afin d'obtenir un effet qui permette de satisfaire un besoin. Synon. emploi, utilisation.Par suite des usages auxquels on destine les métaux étamés, on exige du recouvrement des qualités de fini que l'on ne demande pas aux autres dépôts (Gasnier, Dépôts métall., 1927, p. 53):1. Il ne devait pas être (...) facile de manger proprement quand on mangeait couché (...) on se servait des doigts, ou tout au plus du couteau, pour porter les morceaux à la bouche, car l'usage des fourchettes est moderne; on n'en a point trouvé dans les ruines d'Herculanum...
Brillat-Sav., Physiol. goût, 1825, p. 270.
− [Le compl. du nom désigne qqc. de gén., d'abstr.] Il est sans doute un moyen d'échapper à la confusion. C'est − négligeant l'usage vulgaire de l'argument, et l'appel qu'il fait à toute sorte d'opinions vagues − d'en revenir à notre terreur (Paulhan, Fleurs Tarbes, 1941, p. 90).Le civilisé a (...) fait un usage croissant de l'abstraction (Huyghe, Dialog. avec visible, 1955, p. 29).Rare. [Le compl. du nom désigne qqn] [Philippe IV] lui accorda [à Velasquez] l'usage gratuit du médecin et du chirurgien de la cour (Gautier, Guide Louvre, 1872, p. 263).
− DR. COMM. Droit d'usage. Droit réel permettant à une personne de se servir de la chose d'autrui et d'en percevoir la portion de fruits nécessaire à ses besoins et à ceux de sa famille (d'apr. Cap. 1936). Son droit d'usage ou d'habitation est réglé par les conditions les plus variables, qui créent les rapports de propriété les plus complexes et les plus instables (Jaurès, Ét. soc., 1901, p. 166).
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En partic. Fait d'utiliser quelque chose pour sa consommation, pour ses besoins. Synon. consommation.Usage du beurre, du café, de la viande; usage de la cocaïne, de la drogue, du haschisch, de stupéfiants. Vous avez peut-être, madame, les artères du cerveau en tuyau de pipe. La Dame: Ciel! En tuyau de pipe! L'usage du tabac, docteur, y serait-il pour quelque chose? Je prise un peu (Romains, Knock, 1923, ii, 5, p. 13):2. ... je crois m'apercevoir que le changement qui s'est fait en moi a été beaucoup avancé par l'usage journalier du thé et du vin. Je pense que (...) les buveurs d'eau conservent bien plus long-temps la délicatesse des sensations, et en quelque sorte, leur permière candeur. L'usage des stimulans vieillit nos organes.
Senancour, Obermann, t. 2, 1840, p. 92.
b) Fait de se servir d'un organe, d'un membre; fait de mettre en action, en activité une fonction physique ou intellectuelle. Avoir, perdre, reprendre, retrouver l'usage de l'esprit, du libre arbitre, de la raison, de ses facultés, des jambes, des yeux. Une conscience bourrelée et l'effroi involontaire inspiré par un crime à ceux qui le commettent lui avaient ôté l'usage de la réflexion (Balzac, Gobseck, 1830, p. 435).Le climat de l'Angleterre (...) a renouvelé toutes mes blessures au point de me priver entièrement de l'usage d'un bras (Vigny,Serv. et grand. milit.,1835,p. 147).♦ L'usage des sens. Le fait d'avoir des sensations olfactives, gustatives, visuelles. J'avais perdu en un moment l'usage de mes sens, toutes mes facultés, la possession de moi-même, la raison, à cause d'une femme (A. France, Vie fleur, 1922, p. 527).Je reprends difficilement l'usage de mes sens. Mes yeux me pèsent (...). Quelque part, très loin de moi, les choses de la vie s'agitent (J. Bousquet, Trad. du sil., 1936, p. 63).
2. Utilisation, emploi de quelque chose; possibilité de se servir de quelque chose. L'usage des baïonnettes est une atrocité (Robesp., Discours, Subsist., t. 9, 1792, p. 111).Il fourrait, après usage, sa serviette dans la ceinture de son pantalon (Barbusse, Feu, 1916, p. 146).−
Faire usage de qqc. Utiliser, employer. Synon. se servir de.Faire usage de la force, de son (bon) droit, de son autorité; faire usage de fausses pièces, de faux noms; faire usage de faux. (Il s'assied et ouvre le livre) Il n'en avait pas fait grand usage, ce me semble (...) Les feuilles sont collées les unes aux autres (Dumas père, Margot, 1845, iii, 8etabl., 7, p. 116).Les gendarmes avaient dû faire usage de leurs armes (Camus, Peste, 1947, p. 1308).♦ Faire bon, mauvais usage de qqc. Se servir de quelque chose de manière efficace, conforme ou non; utiliser, employer quelque chose à de bonnes fins ou à des fins condamnables. Les dangers de la systématisation ont été souvent mis en lumière (...) C'est un risque inhérent au système (...) que d'en faire mauvais usage, c'est-à-dire de ne pas tenir compte de tous les faits ou de les violenter pour faire entrer de force dans la construction ceux qui ne s'y plieraient pas volontiers (Lacroix, Marxisme, existent., personn., 1949, p. 57).
− Mettre en usage. Se servir de quelque chose, mettre en action un procédé, quelque chose afin d'obtenir un résultat déterminé. Synon. employer, mettre en œuvre*, utiliser.Mettre tout en usage pour. La jeune coquette avait beau s'éventer gracieusement, sourire à des jeunes gens qui la saluaient et mettre en usage les ruses dont se sert une femme pour cacher son émotion, la douairière (...) savait lire dans son cœur et dans sa pensée (Balzac, Paix mén., 1830, p. 332).
− À l'usage. Lors de l'utilisation, de l'emploi (de quelque chose). Je verrais vite, à l'usage, qu'elle s'essouffle, ainsi que mon corps, beaucoup plus vite (Gide, Journal, 1944, p. 260).
− Faire beaucoup d'usage, faire de l'usage. Pouvoir être utilisé longtemps. Synon. durer.Chaussures, vêtements qui font de l'usage. P. plaisant. [À propos de qqn] L'insolent trépas de mon père avait désobligé les Schweitzer (...) Pour n'avoir su ni le prévoir ni le prévenir, ma mère fut réputée coupable: elle avait pris, à l'étourdie, un mari qui n'avait pas fait d'usage (Sartre, Mots, 1964, p. 9).
− En usage, d'usage. Habituellement employé, couramment utilisé. Être encore en usage; sorti d'usage, de l'usage. Il existe encore un code de la morale et un répertoire des valeurs morales, restés en usage dans la bourgeoisie même (Aymé, Confort, 1949, p. 62).
− Hors d'usage. [En parlant de qqc.] Qui ne peut plus être utilisé du fait de sa vétusté; qui ne peut plus produire l'effet attendu; qui ne fonctionne plus. Synon. désuet, obsolète, usé.Machine, pièce, ustensile hors d'usage. Des berlines hors d'usage traînaient (Zola, Germinal, 1885, p. 1239).P. plaisant. [À propos de qqn] Se sentir hors d'usage pour cette grande action qui va s'engager; d'intelligence non tant diminuée peut-être qu'alentie (Gide, Journal, 1943, p. 225).
− À usage + adj., à usage de + subst.Destiné à être utilisé de façon précise, spécifique. Médicament à usage interne, externe; locaux à usage commercial, à usage d'habitation. L'agencement [de l'école maternelle] apparaît impropre à l'usage domestique, à la vie ordinaire: dans l'air, dans l'odeur, la couleur (...) il y a une incrustation de discipline (Frapié, Maternelle, 1904, p. 40).Lorsque j'aperçois sur un flacon pharmaceutique la mention « poison » ou « réservé à l'usage externe » (...) je songe (...) à notre première tentative d'assassinat (Bazin, Vipère, 1948, p. 185).
− Avoir l'usage de qqn/qqc. Avoir la possibilité, le loisir d'utiliser quelque chose, de disposer de quelque chose; bénéficier des services de quelqu'un. Il m'est resté l'usage de la chambrière (Colette, Képi, 1943, p. 196).Ils avaient l'usage de la cuisine (...) et ils pouvaient s'y tenir toute la journée (Triolet, Prem. accroc, 1945, p. 210).
− À, pour l'usage de. Destiné à être utilisé par une personne ou par une catégorie de personnes; qui est fait spécifiquement à l'intention d'une personne ou d'une catégorie de personnes. La soie était exclusivement réservée aux princes et aux personnages de la plus haute distinction; le camelot et la bure étaient à l'usage de la bourgeoisie et du peuple (Jouy, Hermite, t. 4, 1813, p. 257).Et comme Gabriel et Gridoux s'esclaffaient, elle ajouta pour leur usage et agrément: − C'en est encore une que j'ai trouvée dans les Mémoires du général Vermot (Queneau, Zazie, 1959, p. 231).