2. Au fig. [L'obj. du verbe désigne une fac. ou une attitude hum.; un sentiment, un produit de l'esprit hum.; la vie de l'homme en gén.] Rendre fade (une chose), en affaiblir la vigueur originelle : 7. À la droite de sa mère s'assit le jeune duc d'Orléans. (...) La régularité froide et féminine de ses traits ne s'éveillait jamais du demi-rêve d'ennui et de fatigue qui affadissait tout dans son aspect et son langage incertain.
A. de Vigny, Mémoires inédits,1863, p. 102.
8. − Vulgariser une science, mon mignon, c'est la délayer, l'affadir autant que possible...
É. Zola, Contes à Ninon,1864, p. 292.
9. (10 h. m.) Achevé la lettre à Madrina, avec mélancolie.
− Toute cette sentimentalité musicale qui nous affadit l'âme m'a paru une sorte de vampirisme, dont il nous faut nous défendre par le travail énergique. La musicolâtrie rend esclave, elle nous livre à l'ennemi, par l'énervement de la pensée et du vouloir. (...) Et l'âme qu'elle enchaîne, oubliant tout effort, De sons voluptueux avec amour bercée, S'abandonne elle-même et lâchement s'endort.
H.-F. Amiel, Journal intime,9 févr. 1866, p. 123.
Rem. Énervement « action d'ôter le nerf », vx.
10. « À quoi bon par des promesses d'éternité affadir la vie dont la plus grande beauté est qu'elle est brève et qu'elle ne se recommence jamais. »
M. Barrès, Mes cahiers,t. 4, 6 juill. 1905-6 mai 1906, p. 154.
11. Presque tous les maîtres de l'École française ont un je ne sais quoi de rude et de tendu, plusieurs même une certaine rusticité. Sans affadir leur doctrine, ce jésuite [Bérulle] l'humanise.
H. Bremond, Hist. littéraire du sentiment religieux en France,t. 3, 1921, p. 275.
12. Sévèrement, la critique de l'écran dénonce la guimauve qu'étirent les scenarii américains, leur infantilisme, leur application à affadir, en le répétant, un gag applaudi.
Colette, La Jumelle noire,1938, p. 257.
13. ... la Storia do Mogor, (...) n'eut pas moins de six éditions en France et à La Haye entre 1705 et 1715 sous le titre de Histoire générale de l'Empire du Mogol, dont le Père François Catrou, de la Compagnie de Jésus, (...) prétend être l'auteur, mentionnant tout juste le nom du Vénitien (...), lui qui a (...) expurgé son vocabulaire; lui qui a affadi avec emphase un style primesautier, cru, direct, ce style qu'ils employaient tous à la grande époque les voyageurs, les marins, les hommes d'armes, les découvreurs, ...
B. Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 15.
− P. méton. [L'obj. désigne une pers.] (Cf. affadi A 3).
−
Emploi abs. : 14. Humour : (...) Je me fais une haute idée morale et littéraire de l'humour. L'imagination égare. La sensibilité affadit. L'humour, c'est, en somme, la raison. L'homme régularisé. Aucune définition ne m'a suffi. D'ailleurs, il y a de tout dans l'humour.
J. Renard, Journal,1910, p. 1266.