1. Divertir, occuper agréablement. Synon. récréer, charmer :1. « Ma sœur, s'écrie la Reine, en la voyant, le Prince vient d'arriver à Damiette, il va venir incessamment nous donner des nouvelles de l'armée : et en attendant, il nous envoie ses femmes nous amuser par leurs jeux; venez vous placer près de moi et prendre part à ce divertissement. »
MmeCottin, Mathilde,t. 1, 1805, p. 157.
2. Pour prouver que la profession d'homme de lettres est un des états les plus honorables, on dit que son but est d'instruire, d'amuser et de corriger l'espèce humaine. Pour prouver que c'est le plus honteux des métiers, on nomme quelques-uns de ceux qui l'exercent.
V. de Jouy, L'Hermite de la Chaussée d'Antin,t. 2, 1812, p. 150.
3. Voici l'impression qu'a faite sur moi la lecture de La Féodalité. J'ai été continuellement amusé, mon esprit a toujours été occupé, mais rien ne m'a touché le cœur; rien ne m'a laissé d'impression profonde et durable.
É.-J. Delécluze, Journal,1826, pp. 320-321.
4. Avez-vous sur le métier quelque ouvrage qui occupe et amuse votre pensée? C'est l'essentiel : l'immortalité est une plaisanterie plus ou moins longue dont nous savons le fin mot. Se plaire à soi-même, voilà tout l'écrivain; si on veut plaire de plus à quelques amis, c'est trop.
A. de Lamartine, Correspondance,1830, p. 4.
5. Ah! oui, j'en ai mémoire, Et je vous veux, Lucrèce, amuser de l'histoire. Peu s'en faut qu'à nous tous Brute n'ait fait la loi. Si sa mère eût vécu, Brute aurait été Roi.
F. Ponsard, Lucrèce,1843, I, 4, p. 26.
6. Eh bien! oui, la prison, le désert, le tombeau, tout cela est vrai; je me sens prise..., Valerio, il faut que je m'en aille d'ici! J'ai tout regardé, j'ai tout vu, j'ai été amusée, charmée, ravie, je ne le nie pas! mais, soudain, je viens de m'apercevoir que nous sommes seuls, absolument seuls, au milieu d'un monde qui nous est étranger.
J.-A. de Gobineau, Nouvelles asiatiques,La Vie de voyage, 1876, p. 335.
7. Ce jeu de ballon m'a plus amusé que je n'eusse cru qu'il était encore possible, amusé comme un enfant et comme un dieu, et d'autant plus que je ne m'y sentais pas malhabile. Que Pascal a donc dit sur le jeu des choses absurdes! et que la gratuité précisément de cette lutte, de cet effort, me paraît belle! Oui vraiment, je ne me souviens pas avoir pris même dans ma jeunesse ou mon enfance, plaisir plus ardent, plus pur et plus complet.
A. Gide, Journal,1930, p. 964.
2. Égayer : 8. La gaieté sérieuse qui ne tourne rien en plaisanterie, mais amuse sans le vouloir, et fait rire sans avoir ri; cette gaieté, que les Anglais appellent humour, se trouve aussi dans plusieurs écrits allemands; mais il est presque impossible de les traduire.
G. de Staël, De l'Allemagne,t. 3, 1810, pp. 271.
9. C'est le plaisant, le jovial qui amuse tout le monde, et fait rire le régiment, je veux dire les soldats et les bas officiers; car tout le reste est noble, et, comme de raison, rit à part.
P.-L. Courier, Pamphlets politiques,Lettres particulières, 1820, p. 67.
10.
œdipe. − Quel chemin? le sphinx. − Vous êtes extraordinaire. Dois-je rendre compte à un étranger du but de ma promenade?
œdipe. − Et si je le devinais, moi, ce but. le sphinx. − Vous m'amusez beaucoup.
J. Cocteau, La machine infernale,1934, II, p. 73.
−
Familier a) Amuser la galerie. Amuser son entourage en concentrant son attention sur soi : 11. ... le premier soir, je le vis tout tranquillement allumer à l'ongle de son petit doigt sa cigarette, puis, comme il venait de perdre au jeu, extraire de mon oreille et de mon nez autant de roubles qu'il fallut, ce qui me terrifia littéralement, mais amusa beaucoup la galerie, car il disait, toujours de ce même air tranquille : « Heureusement que cet enfant est une mine inépuisable! »
A. Gide, Les Caves du Vatican,1914, p. 740.
b) Ça me (vous, etc.) amuse(rait) de + inf. Cela me (vous) est (serait) très agréable de ... : 12. le comte, s'assoit. − Héro, cela ne m'amuse plus! héro. − Tu n'aimes plus Marivaux? Bon. Tu ne vas tout de même pas nous faire changer de pièce? Moi, j'étais ravi de mon rôle. Un Seigneur. Que jouez-vous, cher Héro? un Seigneur. C'est discret et mystérieux et il n'y avait pas trop de lignes à retenir. le comte. − Cela ne m'amuse plus de m'amuser. héro. − Tu y as mis le temps.
J. Anouilh, La Répétition,1950, III, p. 72.
13. Justin Weill fermait à demi les yeux, comme saisi d'un nouveau tourment − Ça vous amuse d'obéir? fit-il enfin. Les Juifs obéissent, bien sûr; mais au fond, nous n'aimons pas ça. Nous ne sommes pas des êtres véritablement disciplinés.
G. Duhamel, La Nuit de la Saint-Jean,1935, p. 56.
3. Spéc., dans le domaine des
sensa) [En parlant d'une chose qui flatte la vue notamment dans le domaine de la peint.] Amuser l'œil, les yeux. Charmer la vue : 14. ... les barques qui traversent cette douce rivière mitis Arar, couvertes d'une toile, éclairées d'une lumière pendant la nuit, et conduites par de jeunes femmes, amusent agréablement les yeux.
F.-R. de Chateaubriand, Correspondance générale, t. 1, 1789-1824, p. 106.
15. L'objet de la peinture est indécis. S'il était net, − comme de produire l'illusion de choses vues, ou d'amuser l'œil et l'esprit par une certaine distribution musicale de couleurs et de figures, le problème serait bien plus simple...
P. Valéry, Tel quel I,1941, p. 11.
b) [En parlant d'une chose qui affecte le goût, notamment d'un liquide] :
16. Nous bûmes à la fin un des élixirs les plus remarquables du monde, je crois. Un Constance de 1840 ou 1830, qui m'a − positivement − amusé.
P. Valéry, A. Gide, Correspondance,lettre de P. V. à A. G., mars 1898, p. 313.
c) [En parlant d'un liquide] Amusé de qqc. Agrémenté de : 17. Me souviendrai-je des œufs frits, du jambon par trop sapide, des noisettes grillées que nous croquâmes avec du sel, du robuste vin au parfum enveloppé de goudron; et surtout, au sortir du bain, des verres d'eau glacée amusée d'un peu d'anisette?
A. Gide, Journal,1910, p. 314.