a) Ustensile de table ou de cuisine, utilisé, essentiellement, pour puiser, transvaser ou porter à la bouche des aliments liquides ou peu consistants. Cuiller à moutarde, à soupe, petite cuiller. Des gamelles d'étain et des cuillers de fer (Verlaine,
Œuvres compl.,t. 4, Mes pris., 1893, p. 379).Grange (...) rattrapait le long de son menton, d'un coup de cuillère, la soupe qui découlait (Pourrat, Gaspard,1922, p. 129).Elle souriait (...), en tournant sa cuillère dans sa tasse (Martin du G., Thib.,Belle sais., 1923, p. 899):1. ... le chef du protocole est pris en flagrant délit, remuant une tasse de chocolat glacé avec une cuiller à café. Il n'y a pas de cuiller spéciale pour le chocolat glacé, c'est insensé, dit le Préfet, on aurait dû y penser, le dentiste a bien son davier, le papier son coupe-papier et les radis roses leurs raviers.
Prévert, Paroles,Dîner de têtes, 1946, p. 13.
SYNT. Cuiller (cuillère) en/d'argent, de bois, d'étain, d'ivoire, d'os; cuiller à absinthe, à compote, à confiture, à dessert (ou à entremets), à glace, à œufs, à poisson, à potage, à punch, à ragoût, à salade, à sauce, à sucre, à thé; cuilleron, dos, manche de la cuillère; porter une cuiller à la bouche.
♦ Biscuit à la cuillère (pâtiss.). Gâteau sec de forme allongée, très léger, préparé, notamment, en versant la pâte sur un support à l'aide d'une cuiller. Le gros Boujardon s'asseoit sur l'appui de la fenêtre et, tourné vers nous, avec un gros rire d'homme pâteux, il mange des biscuits à la cuiller (Alain-Fournier, Meaulnes,1913, p. 199).
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En partic. ♦ Cuiller de/en bois. Synon. mouvette.Il faut se servir toujours de cuillères de bois pour travailler les mets, parce que le métal les saisit par le refroidissement (Audot, Cuisin. campagne et ville,1896, p. 111).
♦ Cuillère percée, cuillère passoire. Que votre détrempe soit assez liquide, et qu'elle puisse passer à travers une cuillère percée (Viard, Cuisin. roy.,1831, p. 12).
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Cuiller à pot. Cuiller à long manche et à cuilleron hémisphérique utilisée pour servir la soupe. Synon. louche.Une petite fille armée d'une énorme cuiller à pot en cuivre étamé, pleine d'une eau grasse que l'on appelait emphatiquement du bouillon (Jouy, Hermite,t. 3, 1813, p. 28).Il avait déjà rempli l'écuelle de l'abbé, quand (...) nous vîmes frère Ange (...) Mon père en leva de surprise sa cuiller à pot jusqu'aux poutres (A. France, Rôtisserie,1893, p. 38).Rem. En arg. typogr. le syntagme désigne, p. anal., un composteur profond. Il se sert d'une cuiller à pot pour composer (Boutmy, Typogr. paris., 1874, p. 40).
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Loc. fig. et fam. ♦ Vieilli. Avaler, rendre sa cuiller, verser sa cuillère au magasin. Mourir. Synon. avaler sa fourchette, sa gaffe, sa langue.[Je l'étranglais; il me regardait.] J'croyais que l'tremblement allait lui faire rendre sa cuiller (allait le faire mourir) (Brissac, Souv. prison et bagne,1880, p. 43).
♦ En deux (trois, cinq) coups de cuiller à pot. Très rapidement et sans difficulté apparente. Des Allemands, armés de tondeuses mécaniques, dénudaient les crânes en trois coups de cuiller à pot (Ambrière, Gdes vac.,1946, p. 48).
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Être à ramasser à la (petite) cuiller. Être en mauvais état ou privé de toute énergie à la suite d'une blessure (vieilli) ou d'un effort physique intense. J'aime encore mieux... − Te casser les reins? ... Qu'on te ramasse avec la petite éponge et la petite cuiller? (Vialar, Carambouille, 1949, p. 159):2. Mais le régiment mon petit pote... Mais c'est pas comme tu t'imagines!... (...) Tu peux pas te rendre compte... surtout à ton âge!... Les autres, ils ont vingt et une piges! C'est déjà un avantage. T'aurais pas la force de tenir... On te ramasserait à la cuiller...
Céline, Mort à crédit,1936, p. 696.
♦ Ne pas y aller avec le dos de la cuiller. Agir sans modération. Synon. exagérer.La police avait dû charger sur des manifestants, (...). On n'y avait pas été avec le dos de la cuiller. (...). Nombreux blessés (Aragon, Beaux quart.,1936, p. 263).