1. Réserver à quelqu'un une situation, un emploi d'une certaine durée. a) [Le suj. désigne le destin, la fatalité] Vouer quelqu'un à un avenir plus ou moins favorable. La masse de notre espèce étant évidemment destinée, d'après une insurmontable fatalité, à rester indéfiniment composée d'hommes vivant d'une manière plus ou moins précaire (Comte, Philos. posit.,t. 4, 1839-42, p. 162).
b) [Le suj. désigne une pers.] (Avoir l'intention de) consacrer, préparer une personne à une carrière. La carrière à laquelle ma famille me destine m'épargnera, j'espère, le désagrément de voyager en coucou (Balzac, Début vie,1842, p. 381).Ses parents ne le [Rembrandt] destinaient pas à la carrière artistique mais ne mirent pas d'opposition à ce qu'il suivît le penchant qui l'entraînait (Ménard, Hist. B.-A.,1882, p. 210).− Emploi pronom. réfl. Madame Beaudeloche (...) (avec dignité). Edgar, songe que tu te destines au notariat (Labiche, Edgar,1852, 2, p. 207).Trois grands fils (...) qui se destinaient au barreau (Beauvoir, Mém. j. fille,1958, p. 273).
c) P. ext. [Le suj. désigne une qualité physique ou morale, une chose abstraite, etc.] Cette énergie nécessaire à la compagne d'un homme que sa carrière destine aux orages de la vie politique (Balzac, Lys,1836, p. 321).Elle [une fillette] montre une grâce, une rapidité dans la course, qui la destinent à la lutte et à la danse (Colette, Pays connu,1949, p. 161).−
P. anal. : 3. Fabre, lorsqu'il a décrit l'application que met le scarabée sacré à malaxer la pilule où il enfermera son œuf, ajoute curieusement que les organes de cet insecte semblaient le destiner à une tout autre activité.
Paulhan, Les Fleurs de Tarbes,1941, p. 160.
2. [Le suj. désigne une pers.] Mettre en réserve quelqu'un pour l'utiliser à un usage occasionnel. L'homme devrait n'avoir plus aucun rapport de société avec celles des femmes jeunes qu'il ne destine pas à son lit (Montherl., J. filles,1936, p. 978):4. ... le commandant en chef m'assura que, sans pouvoir fixer encore une date précise, il donnerait avant peu l'ordre de marcher sur Paris et que c'était la division Leclerc qu'il destinait à l'opération.
De Gaulle, Mémoires de guerre,1956, p. 296.
Rem. On rencontre parfois la constr. vieillie destiner qqn pour + nom de lieu avec le sens de « envoyer à ». Ces personnes (...) seraient toujours incapables de faire ce travail loin des lieux pour lesquels on les destinerait (Baudry des Loz., Voy. Louisiane, 1802, p. 290). [Les forçats arrivants] sont soumis à l'examen des médecins et chirurgiens en chef qui, sur la plus légère apparence de maladie les destinent pour l'hôpital (Raban, Marco Saint-Hilaire, Mém. forçat, t. 4, 1828-29, p. 29).