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En partic. a) Dans le domaine milit.[Le compl. désigne un lieu, une position] Conquérir, occuper, tenir en sa possession par la force. Être, se rendre maître du champ de bataille, d'une place, d'une ville. Le bailli de Suffren s'illustra comme un de nos plus grands marins. L'Angleterre n'était plus la maîtresse incontestée des mers (Bainville,Hist. Fr.,t. 2, 1924, p. 14).Nous ne pouvions suspendre nos opérations de marche vers Berlin qu'une fois maîtres de la position du Rhin (Foch,Mém.,t. 2, 1929, p. 284).
b) [Le compl. désigne un phénomène matériel, une force physique émanant d'une chose ou d'un être] Avoir, réduire en son pouvoir par la contrainte ou par un effort physique. Être, se rendre maître d'un incendie, d'une émeute, d'un animal, d'un véhicule. Malgré leurs efforts, le ballon s'abaissait toujours, en même temps qu'il se déplaçait avec une extrême vitesse, suivant la direction du vent (...). Ils n'étaient évidemment plus maîtres de l'aérostat (Verne,Île myst.,1874, p. 5).Alban penché, les dents serrées, tout le visage serré, épiait la seconde où ce ne serait plus lui qui serait maître de l'animal, mais l'animal qui serait maître de lui (Montherl.,Bestiaires,1926, p.417).
c) Souvent en emploi adj. (Être) maître de + subst.
α) [Le compl. désigne un mouvement du corps, du coeur ou de l'esprit] Soumettre au pouvoir de la raison, de la volonté. Être maître de ses gestes, de ses nerfs, de ses passions, de ses idées. Sous le coup d'une terreur panique dont je n'étais plus le maître, je me jetai à deux genoux au pied de mon lit (Vallès,Réfract.,1865, p. 38).Je le vis très calme et très maître de sa pensée; très maître aussi de ses yeux qu'il ne fermait plus (G.Leroux,Parfum,1908, p. 79).Quand je suis dans mes mauvais moments je ne suis plus tout à fait maîtresse de mes associations d'idées (Claudel,Ours et lune,1919, 2, p. 603).♦
Être maître de soi. Dominer ses passions, ses impulsions, agir ou réagir sous le contrôle de la volonté. Synon. se posséder, se maîtriser.Elle m'a montré ce que c'était qu'une femme forte et maîtresse d'elle-même (J. Bousquet,Trad. du silence,1935, p. 36).Maître de l'événement comme il était le maître de soi (Montherl.,Lépreuses,1939, p. 1396):10. ... il ne fallait rien moins que sa dignité de témoin et ce sang de soldat qui coulait dans ses veines, pour dominer ses alarmes fraternelles et le contraindre à demeurer calme, froid, parfaitement maître de lui.
Ponson du Terr.,Rocambole,t. 3, 1859, p. 403.
β) [Le compl. désigne un objet de connaissance, une discipline, une technique] Connaître de manière approfondie, posséder, maîtriser. On peut reconnaître les hommes vraiment habiles et maîtres de leur sujet au ton de simplicité et de bonhomie qu'ils mettent dans leurs discours (Maine de Biran,Journal,1816, p. 149).C'était en vain que pendant des années, Gustave s'était enfermé dix heures par jour pour se rendre maître du droit, de l'économie, de l'histoire − et aussi de la stratégie (Drieu La Roch.,Rêv. bourg.,1937, p. 203).
d) Être maître de + inf. Avoir la liberté, la possibilité de faire quelque chose. Je desire vous fixer dans ma cour, cependant vous êtes le maître de la quitter (Genlis,Chev. Cygne,t. 2, 1795, p. 5).La duchesse avait passé à la promulgation d'autres décrets qui, s'appliquant à des vivants, pussent lui faire sentir qu'elle était maîtresse de faire ce que bon lui semblait (Proust,Fugit.,1922, p. 577).