a) Ne pas atteindre, ne pas obtenir ce que l'on visait; ne pas saisir une occasion. − [Le compl. désigne une chose concr., une réalité tangible] Un jour, au tennis, chez les Dubreuil... Tu me regardais tout le temps... Tu ratais toutes les balles (H. Bataille, Maman Colibri,1904, i, 12, p. 11).Les Anglaises que l'on rencontre à Saint-Moritz prétendent qu'elles s'y trouvent par erreur, ayant raté le train de Malte (Morand,Londres,1933, p. 76).
− [Le compl. désigne une réalité abstr.] Synon. manquer.Rater une affaire, son effet. Il ratera son élection. Eh! bien, tant mieux: il sera déplacé et nous en serons délivrés (Stendhal,L. Leuwen, t. 3, 1835, p. 121).Si draconien soit-il, un règlement trouve toujours des accommodements. Notre mère, qui avait raté sa vocation de surveillante pour centrale de femmes, se chargea de veiller à sa plus stricte application (H. Bazin, Vipère,1948, p. 51).
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Locutions ♦ Rater le coche. V. coche2.
♦ Rater son coup*.
♦ Ne pas (ne jamais) rater une (l')occasion de (+ verbe inf.). Ne pas laisser échapper la possibilité de. Cet universel brochurier (...) ne rate jamais l'occasion de se faire un peu de réclame (Bloy,Journal,1892, p. 24).Edmond, lui, n'était pas un compagnon pour son jeune frère (...) il ne rate pas une occasion de l'humilier, parce qu'il n'est pas fort (Aragon,Beaux quart.,1936, p. 51).Ne pas en rater une (pop.). Accumuler les impairs, les gaffes. C'est le plus haut devoir des poètes, pendant les heures tragiques que nous traversons, déclara le professeur Bestombes, qui n'en ratait pas une, de nous redonner le goût de l'épopée (Céline,Voyage,1932, p. 124).
b) Ne pas réussir. Rater une robe, une sauce, un tableau; rater un examen. Il suait de peur à l'idée qu'il pouvait le rater, son bouquin (Martin du G.,Thib., Sorell., 1928, p. 1235).− Tu arrives en plein drame! me dit-elle gaiement. La mayonnaise est ratée! − Bonjour, dit Lambert d'un air sombre. Oui, elle est ratée, moi qui ne les rate jamais! − Je te dis que ça peut se reprendre, continue, dit Nadine (Beauvoir,Mandarins,1954, p. 214).−
En partic. Rater sa carrière, sa vie. Ne pas réussir comme on pouvait l'espérer. Certes, sa vie était ratée, tout à fait ratée. Pourtant il avait aimé, lui (Maupass.,Contes et nouv., t. 1, Regret, 1883, p. 904):2. Barrès a raté sa carrière. Il a beaucoup de charme, mais pas grande valeur. S'il avait su quelle était sa séduction, il ne se serait peut-être pas lancé dans des affirmations qui en comportent si peu. C'est pourtant lui qui fait les meilleurs articles dans le genre dit: nationaliste, mais encore faut-il les choisir.
Gide,Corresp. [avec Valéry], 1899, p. 348.