RELANCER, verbe trans.
I. A. − 1. Jeter à son tour une chose qu'on a reçue. Si je la vois [la grenade], il faut que je l'attrape comme un paquet, et que je la relance le plus loin possible (Malraux, Cond. hum.,1933, p. 250).− Lancer ou projeter en sens inverse. Et puis une force vous heurtait d'une poussée brutale, vous relançait très haut en l'air, et toute la Médée vibrait (Loti, Mon frère Yves,1883, p. 136).La porte, dont il relança le battant sur moi, violemment, d'un coup de pied (Céline, Voyage,1932, p. 340).
2. Au fig., vx. Repousser durement. Synon. rabrouer, rembarrer.Qu'on lise, dans ma Lanterne aux Parisiens, comme je relançois ce prophète de malheurs qui défiguroit ma République (Desmoulinsds Vx Cordelier,1793-94, p. 192).
B. − 1. Faire partir une nouvelle fois. Le capitaine, craignant le voisinage de la côte d'Asie par le vent d'ouest qui s'élève, nous relance en pleine mer (Lamart., Voy. Orient,t. 2, 1835, p. 323).Et je ne crois guère possible qu'un grand projet littéraire neuf s'empare de moi et me relance en avant (Martin du G., Souv. autobiogr.,1941, p. ciii).
2. Relancer un feu, un four. Faire repartir un feu, le feu d'un four qui est en sommeil, qui tombe. ♦ Relancer un moteur, une machine. Faire fonctionner à régime normal un moteur, une machine qui fonctionnaient au ralenti. P. métaph. La femme ne se suffit pas: elle ne va pas de soi; sa fébrilité a besoin d'être relancée et remontée, de recevoir une impulsion, un la (Goncourt, Journal,1887, p. 396).
−
Au fig. Donner un nouvel élan à ce qui tend à décroître, à retomber. Synon. ranimer, stimuler.Relancer une conversation, l'intérêt du débat, une fête, la consommation, une affaire, l'économie: Hitler, au sommet de sa folie, a prétendu stabiliser l'histoire pour mille ans. Il se croyait sur le point de le faire, (...) quand la bataille d'Angleterre et Stalingrad l'ont rejeté vers la mort et ont relancé l'histoire une fois de plus en avant.
Camus, Homme rév.,1951, p. 232.
3. JEUX DE CARTES. Mettre une mise supérieure à celle d'un joueur précédent pour l'obliger à miser à nouveau. Après plusieurs passes, mon voisin relance de dix mille... je ne les avais plus... je fais tapis en toute tranquillité... il étale un full aux as par les dames (Vailland, Drôle de jeu,1945, p. 31).
C. − 1. VÉN. ,,Faire repartir un animal de chasse qui s'était arrêté`` (Vén. 1974). [Dans un cont. métaph.] Greta Garbo, cette biche relancée à travers l'Europe par la meute des journalistes (Mauriac, Journal 1,1934, p. 29).
2. Vieilli. Poursuivre, traquer. Battus sur tous les points, chassés du gouvernement, des clubs, des sections, relancés et comme bloqués dans les faubourgs, les Jacobins avaient résolu un dernier effort pour reprendre le pouvoir (Sainte-Beuve, Prem. lundis,t. 1, 1827, p. 205).C'est un terrible bandit des gorges d'Ollioules, le comte Sévéran, qu'il va relancer jusque dans son aire, parmi ses coupe-jarrets et ses concubines (A. Daudet, Lettres moulin,1869, p. 158).
3. Au fig. Poursuivre quelqu'un avec obstination pour en obtenir quelque chose. [Lisbeth] relança les deux tourtereaux jusque dans leur nid au Gros-Caillou (Balzac, Cous. Bette,1846, p. 231).Testenel était taillé comme un taureau, mais lent et méticuleux. Sénac venait le relancer huit ou dix fois l'heure (Duhamel, Désert Bièvres,1937, p. 174).− En partic. Poursuivre de ses assiduités. Incapable de surmonter sa déception, de se passer de cette femme, il la relance, elle le fuit (Proust, Guermantes 2,1921, p. 159).
− Renouveler une demande auprès de quelqu'un qui ne s'exécute pas. Relancer un débiteur, un fournisseur. Ils convinrent d'aller relancer leur client, le lendemain matin (Gide, Faux-monn.,1925, p. 1176).
II. − CONSTR. Réparer un ouvrage de maçonnerie en remplaçant les pierres et les briques défectueuses par de nouvelles que l'on encastre au même endroit. Il y aurait (...) quelques pierres à relancer surtout dans les soubassements (Mérimée, Lettres L. Vitet,1840, p. 29).
REM. Relançade, subst. fém.,rare. Relance. Pas un mot de mon arrivée à personne, bien entendu, de peur des rapports et des relançades (Flaub., Corresp.,1854, p. 182).
Prononc. et Orth.: [ʀ
əlɑ
̃se], (il) relance [-lɑ
̃:s]. Att. ds Ac. dep. 1694. Conjug., prend une cédille devant a et o: relançai(s), -çons. Étymol. et Hist. 1. a) Ca 1165 relancier inf. subst. « action de lancer de façon répétée » (Benoît de Ste-Maure, Troie, 14835 ds T.-L.); b) 1213 « action de lancer » (Faits des Romains, éd. L. F. Flutre et Sneyders de Vogel, 411, 24); 2. av. 1573 vén. (Jodelle,
Œuvres, éd. Lemerre, t. 2, p. 305); 3. a) 1653 « aller trouver quelqu'un pour lui demander quelque chose » (Vaugelas, Q. C., III, 8 ds Littré); b) 1713 relancer qqn dans tous les coins de la ville (Hamilton, Mém. du C. de Grammont, p. 52); 4. a) 1651 « attaquer » (Scarron, Rom. comique, éd. Magne, p. 317); b) 1671 « gourmander, traiter mal en parole ou en action » (Sévigné, Lettres, éd. R. Duchêne, t. 1, p. 150); 5. 1765 relancer au jeu (Encyclop. t. 14). Dér. de lancer*; préf. re-*. Fréq. abs. littér.: 276. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 123, b) 349; xxes.: a) 296, b) 701.
DÉR. 1. Relancement, subst. masc.a) Action de relancer quelqu'un. Synon. relance.Puis il s'étendait sur le relancement dans le travail, opéré sur lui à tout moment par sa femme (Goncourt, Journal,1891, p. 163).b) Technol. Action de relancer quelque chose. Le tracé de ces cames est prévu pour que les mouvements d'arrêt et de relancement du cylindre se fassent avec grande douceur (Civilis. écr.,1939, p. 8-12).− [ʀ
əlɑ
̃smɑ
̃]. − 1reattest. 1875 (Lar. 19e); de relancer, suff. -ment1*.
2. Relanceur, subst. masc.,tennis. Celui qui renvoie (p. oppos. au serveur). Après une première faute, le serveur a droit à un second service; s'il le manque, le relanceur marque un point (Jeux et sports,1967, p. 1371).− [ʀ
əlɑ
̃sœ:ʀ]. − 1resattest. a) 1881 arg. relanceur de pleins (Henri IV cité ds Fustier, Suppl. dict. Delvau), b) 1898 « au tennis, joueur qui renvoie la balle de service » (Saint-Clair, La Paume et le lawn tennis ds Petiot); de relancer, suff. -eur2*.