2. [Par la suite] Mouvement intellectuel, littéraire, artistique qui visait à renouveler les formes de pensée et d'expression en rejetant les règles classiques et le rationalisme, en prônant la nature, le culte du moi, la sensibilité, l'imagination, le rêve, la mélancolie, la spiritualité, en réhabilitant le goût contemporain, la couleur locale, la vérité historique. Romantisme, prédominance de la passion sur la forme et de l'inspiration sur la règle (Flaub., Corresp., 1871, p. 230).Le romantisme (...), en exaltant le sentiment, l'imagination et l'intuition, allait provoquer un remaniement profond de la pensée occidentale (Hist. sc., 1957, p. 1565).a) LITT. [Notamment en Allemagne avec Goethe, Novalis, Tieck, en Angleterre avec Byron, Shelley, Keats, en France avec Mmede Staël, Chateaubriand, Senancour, Nodier, Lamartine, Vigny, Michelet, Dumas, Hugo, Sainte-Beuve, Sand, Musset, Gautier] Mouvement, art littéraire qui a donné une large place aux descriptions poétiques, aux épanchements intimes, aux sujets sentimentaux, religieux, fantastiques, aux décors historiques (notamment médiévaux), exotiques, et qui a pratiqué le mélange des genres, recherché les effets de contraste. Chateaubriand peut être considéré comme (...) le Sachem du Romantisme en France. Dans le Génie du Christianisme il restaura la cathédrale gothique; dans les Natchez, il rouvrit la grande nature fermée; dans René, il inventa la mélancolie et la passion moderne (Gautier, Hist. romant., 1877 [1872], p. 4).Le vrai cénacle romantique se tint dans le salon rouge de Victor Hugo, rue Notre-Dame-des-Champs. C'est de là qu'est sortie la littérature doctrinale du romantisme de 1827, tel qu'il s'exprime dans les manifestes et les préfaces − celle de Cromwell surtout. Sainte-Beuve, Vigny, Dumas, Musset (...), des artistes, Delacroix, Devéria (...) sont assidus (Thibaudet, Hist. litt. fr., 1936, p. 181).V.
défini II B ex. de Hugo:
Le romantisme, (...) ce n'est ni le mépris des unités, ni l'alliance du comique et du tragique (...). Le romantisme, c'est l'étoile qui pleure, c'est le vent qui vagit, c'est la nuit qui frissonne, la fleur qui vole et l'oiseau qui embaume; c'est le jet inespéré, l'extase allanguie, la citerne sous les palmiers, et l'espoir vermeil et ses mille amours, l'ange et la perle, la robe blanche des saules (...)! C'est l'infini et l'étoilé...
Musset, Lettres Dupuis Cotonet, 1836, p. 671.
− Péj. Ses opinions littéraires sont saines, et le poison du romantisme ne l'a pas encore envahi (Vallès, Réfract., 1865, p. 91).Les naturalistes (...) nous ont débarrassés des inhumains fantoches du romantisme et (...) ont extrait la littérature d'un idéalisme de ganache et d'une inanition de vieille fille exaltée (Huysmans, Là-bas, t. 1, 1891, p. 7).
− Manière particulière de manifester les caractéristiques de ce mouvement. Romantisme + adj. qualificatif.Sa langue [Barbey d'Aurevilly] d'un romantisme échevelé, pleine de locutions torses, de tournures inusitées, de comparaisons outrées (Huysmans, À rebours, 1884, p. 214).Les cénacles de 1830 ont à peine connu le romantisme allemand (...) les grandes revendications morales (...) de la nouvelle école ont trouvé en France, dès le XVIIIesiècle, (...) un vaste écho dans les correspondances, les écrits intimes (...) le romantisme français eut avant tout des origines françaises (Béguin, Âme romant., 1939, p. 327).Le romantisme de + subst. (désignant (un aspect d')une pers.).Tout me prédestinait (...) au romantisme, (...) pas au romantisme de la forme (...), mais au romantisme de l'âme et de l'imagination, à l'idéal pur (Renan, Souv. enf., 1883, p. 89).V. colorié ex. 6.
b) BEAUX-ARTS. Mouvement, esthétique qui refuse de copier les œuvres de l'Antiquité, qui abandonne les figures mythologiques. En partic., PEINT. (notamment chez Gros, Géricault, Delacroix). Art qui représente une nature propice à la rêverie, des scènes moyenâgeuses, exotiques ou familières, qui cherche à émouvoir par une simplicité naïve de composition ou par la vivacité du mouvement, la richesse éclatante des coloris. À la période classique correspond un graphique de mouvement calme (arabesque du Poussin) dominé par la raison (...). Avec le romantisme, le flux émotif tend à rompre le froid équilibre (arabesque mouvementée ascendante de Delacroix [...]) (Arts et litt., 1935, p. 28-11).Le romantisme est en France la première révolution littéraire qu'il soit impossible de séparer d'une révolution dans les arts plastiques (...). Le Radeau de la Méduse au salon de 1819 et les Massacres de Scio au salon de 1824 avaient révélé dans un grand éclat une peinture nouvelle. Mais c'est le salon de 1827 qui (...) met à l'ordre du jour la question du romantisme plastique (...) par deux toiles aujourd'hui déclassées, (...) la Naissance de Henri IV par Eugène Devéria, et le Mazeppa de Louis Boulanger (Thibaudet, Hist. litt. fr., 1936, pp. 181-182).V. intimité I B ex. de Baudelaire.
c) MUS. [Notamment avec Beethoven, Weber, Schubert, Berlioz, Chopin, Schumann, Liszt, Wagner, Brahms] Mouvement, art musical qui exprime des émotions poétiques et sentimentales, qui évoque des scènes épiques, fantastiques. Alors que le romantisme était à la mode, il [Reber] aurait pu (...) se désoler au bord des lacs, agiter au milieu des rochers une crinière désespérée, maudire les dieux et les hommes (...), il aurait su faire rugir les cuivres et bouillonner les violons (Saint-Saëns, Harm. mélod., 1885, pp. 294-295).La « première Variation » [de Beethoven] traduit le bercement propice au rêve; (...) les ombres (...) prennent une couleur sentimentale, dont le romantisme évoque curieusement un des thèmes les plus fameux de Berlioz (Rolland, Beethoven, t. 2, 1937, p. 484).