A. − PSYCHOL., PHYSIOL. Phénomène par lequel une stimulation physiologique (externe ou interne) provoque, chez un être vivant et conscient, une réaction spécifique produisant une perception; état provoqué par ce phénomène. Éprouver, produire une sensation; sensation agréable, désagréable, douloureuse, pénible; sensation indéfinissable, vague, vive. Les sensations proprement dites, c'est-à-dire (...) celles que recueillent les organes spéciaux des sens (Cournot, Fond. connaiss., 1851, p. 23).V.
sensibilité I A 2 a ex. de Destutt de Tracy, Duhamel, Lamarck, Flaubert:
1. ... toute sensation appartient à un certain champ. Dire que j'ai un champ visuel, c'est dire que par position j'ai accès et ouverture à un système d'êtres, les êtres visibles, qu'ils sont à la disposition de mon regard en vertu d'une sorte de contrat primordial et par un don de la nature, sans aucun effort de ma part...
Merleau-Ponty, Phénoménol. perception, 1945, p. 250.
♦ [Constr. avec un adj. ou un compl. prép. de désignant le sens permettant la sensation] Sensation gustative, olfactive, tactile, visuelle; sensation du goût, du tact, du toucher, de la vue. Il faut avoir entendu une langue musicale (...) pour savoir ce que la sensation de l'ouïe peut ajouter aux sentiments de l'âme (Taine, Philos. art, t. 2, 1865, p. 171).Ces lettres qui éliminent la parole et la suppléent, on cherche à les concentrer encore davantage en une sensation auditive plus simplifiée. Aujourd'hui, on ne dit même plus O N U; on pétrit cette suite de lettres séparées en une seule articulation continue: ONU (Huyghe, Dialog. avec visible, 1955, p. 43).
♦ [Constr. avec un compl. prép. de désignant la nature de la sensation] Sensation de chaud, de froid; sensation de faim, de soif; sensation d'acidité, d'aigreur, d'oppression, de picotement. On avait l'estomac vide, le repas du soir ayant consisté en deux betteraves pour les six hommes, qu'ils n'avaient même pu faire cuire, faute de bois sec, et dont la fraîcheur sucrée s'était changée bientôt en une intolérable sensation de brûlure (Zola, Débâcle, 1892, p. 445).− « Elle est perdue » (...). L'infirmière, qui passait, s'approcha, et baissant la voix: − « Vraiment, docteur, est-ce que vous la croyez... » Cette fois, Gregory se détourna pour ne plus entendre le mot. La sensation d'étouffement lui devint intolérable (Martin du G., Thib., Cah. gr., 1922, p. 612).
− Sensation épileptique. Sensation sans objet constituant l'élément essentiel, souvent initial et parfois unique des crises épileptiques. Certaines crises d'épilepsie à séméiologie végétative s'accompagnent de symptômes sensitifs qui peuvent être considérés comme des sensations épileptiques végétatives (Méd. Biol.t. 31972).
− Sensation externe. Sensation transmise par les organes sensoriels périphériques et se rapportant à des objets extérieurs. La grande erreur des sensualistes a été de voir dans les seules sensations externes la source de toute connaissance humaine; bien au contraire, la connaissance supérieure provient des mille sensations internes, dont le faisceau convergent constitue l'imagination, véritable faculté centrale (Béguin, Âme romant., 1939, p. 58).
− Sensation interne. Sensation que le sujet rapporte à son corps, à une partie de son organisme. V. supra ex. de Béguin.
− Sensation primaire. ,,Sensation qui est le résultat direct d'un stimulus`` (Méd. Biol. t. 3 1972).
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Sensation réflexe. ,,Sensation ressentie à un endroit autre que celui où s'exerce un stimulus`` (Méd. Biol. t. 3 1972). Rem. 1. La prédominance affective n'est pas toujours facilement dissociable de la prédominance représentative dans la sensation: En nous élevant dans l'échelle des sens, nous trouvons que la sensation commence à acquérir une valeur représentative, et à cesser d'être une simple affection (Cournot, op. cit., p. 150). Il faut d'abord distinguer entre les sensations dites affectives et les sensations représentatives. Sans doute on passe graduellement des unes aux autres; sans doute il entre un élément affectif dans la plupart de nos représentations simples. Mais rien n'empêche de le dégager, et de rechercher séparément en quoi consiste l'intensité d'une sensation affective, plaisir ou douleur (Bergson, Essai donn. imm., 1889, p. 36). 2. Jusqu'au déb. du xixes. sensation et sentiment ont pu être donnés comme synon.: Aucune de nos humeurs, ni aucun de nos organes, pas même nos nerfs, n'ont en propre la faculté de sentir. Ce n'est que par illusion que nous attribuons l'effet singulier qu'on nomme sensation ou sentiment, à une partie affectée de notre corps; aucune des matières qui composent cette partie affectée ne sent réellement et ne sauroit sentir (Lamarck, Philos. zool., t. 2, 1809, p. 146).