1. a) Disposition particulière ou impulsion qui porte quelqu'un à agir, à se comporter ou à se développer d'une certaine façon. Synon. propension.Une tendance se manifeste; combattre une tendance; tendance à l'amaigrissement. Avec ses tendances à l'embonpoint, elle deviendra énorme (Pailleron, Étincelle, 1879, vii, p. 31).
b) Synon. de inclination (v. ce mot B), de penchant (v. ce mot II).Tendance à vouloir tout connaître. C'est moi qui dus combattre ma tendance à parler par métaphores (Giraudoux, Simon, 1926, p. 60).Nos habitudes intellectuelles, nos tendances de pensée (Benguin, Âme romant., 1939, p. 395).−
Loc. verb. ♦ Avoir tendance à. Être porté, enclin à. J'avais spontanément tendance à raconter tout ce qui m'arrivait: je parlais beaucoup, j'écrivais volontiers (Beauvoir, Mém. j. fille, 1958, p. 70).
♦ Avoir une tendance à. Tout homme a une tendance à se croire irrésistible (Maupass., Contes et nouv., t. 1, Vains conseils, 1884, p. 933).Les enfants ont toujours une tendance soit à déprécier, soit à exalter leurs parents (Proust, J. filles en fleurs, 1918, p. 771).[Avec un adj.] Matifat, passionné pour les acteurs, avait une légère tendance à l'obscénité (Balzac, C. Birotteau, 1837, p. 210).Nous avons, à notre âge, une fâcheuse tendance à juger les gens trop sévèrement et à condamner sans appel (Gide, Faux-monn., 1925, p. 1102).Rare. Avoir des tendances à. Monsieur l'Abbé, je crois que j'ai des tendances à devenir libre penseur (Martin du G., J. Barois, 1913, p. 220).
♦ Avoir tendance de (rare). Au bout du quai, un double courant d'air, ascendant et descendant (...), ventelet qui avait tendance de faire voltiger les jupes maintenues par un élastique au-dessus des genoux aigus de l'adolescente (Cendrars, Bourlinguer, 1948, p. 388).
− Loc. subst. Procès* de tendance.
2. Orientation commune à un groupe de personnes, à une collectivité. Tendance actuelle; tendances antagonistes, contradictoires, hostiles, diamétralement opposées; tendances caractéristiques, marquantes; tendances matérialistes; conflit de tendances; une tendance se dessine. a) Domaine
pol.Tendance politique; tendance syndicale; les représentants des grandes tendances politiques; personnes de toutes tendances et de toutes opinions; appartenir à telle tendance. Bien que libéral d'origine et de tendances, il plut à l'Empereur (A. France, Lys rouge, 1894, p. 41).En réalité, deux tendances divisent la délégation. Il y a celle des violents (...). Il y a celle des manœuvriers (De Gaulle, Mém. guerre, 1956, p. 150).[En parlant d'un journal, d'une œuvre d'art] Christine fit sauter la bande d'un journal français de tendance bourgeoise et universitaire (Malègue, Augustin, t. 2, 1933, p. 494).L'autre jour au cinéma, j'ai assisté à un film à tendances pacifistes qui montrait les horreurs de la guerre: tout le monde applaudissait (Beauvoir, Mém. j. fille, 1958, p. 302).− En partic. Orientation à l'intérieur d'un groupe ou d'un parti, dont se réclame une fraction de ce groupe ou de ce parti; p. méton., cette fraction elle-même. Conflit de tendances. Côté enseignants (deux tiers syndiqués au SNES, tendance pro-communiste, ou au SGEN, tendance CFDT, et un tiers de conservateurs), tout n'a pas toujours baigné dans l'huile (Le Point, 13 juin 1977, p. 108, col. 2).Le benjamin RPR de l'Assemblée (...), gaulliste tendance Raymond Barre (Le Point, 8 sept. 1980, p. 42, col. 2).
b) Domaine
artist., de
mouvements d'idées ou de
cult.Tendances de l'art, de la mode, de la psychanalyse; une école artistique de tendances avancées. Il était mille fois plus séduit par le talent de musiciens qui lui étaient personnellement antipathiques et qui représentaient en art des tendances ennemies (Rolland, J.-Chr., Nouv. journée, 1912, p. 1563).Y a-t-il des tendances très définies dans la mode actuelle? Disons qu'il y en a deux: la tendance super-classique et les fantaisies souvent exotiques du nouveau prêt-à-porter (Elle, 14 juin 1976, p. 11, col. 3).− En partic. ,,Dans une œuvre d'un style donné, présences d'indices décelant l'influence probable d'un style différent`` (Vogüé-Neufville 1971).
− Absol. La tendance est à. On a beaucoup discuté de l'influence du film sur la délinquance juvénile. La tendance est aujourd'hui à ne pas l'exagérer (Le Figaro, 19-20 janv. 1952, p. 9, col. 4).Un besoin de clarté et de simplification fait disparaître les formes compliquées et les meubles inutiles. La tendance est aux formes géométriques, aux lignes droites, aux courbes pures (Viaux, Meuble Fr., 1962, p. 124).
3. PSYCHOL., PHILOS. Principe dynamique, puissance d'action, inné(e) ou acquis(e), qui dirige (l'homme) vers une fin, un acte ou un comportement, dont l'obtention procure généralement du plaisir (d'apr. Foulq. 1971). Tendance acquise, ancestrale, héréditaire, innée, instinctive; tendances affectives, intellectuelles; tendances altruistes, égoïstes; tendance dépressive, ludique, morbide, névrotique, vitale; tendances homosexuelles; tendances masochistes, perverses, subversives; tendances naturelles; tendance dominante, invincible; présenter une tendance jusqu'à l'obsession. Les lois de l'hérédité (...) expriment seulement la manière dont les caractères immanents de l'individu s'établissent. Mais ces caractères ne sont que des tendances, des potentialités (Carrel, L'Homme, 1935, p. 303).Pour la pensée indienne, la vie intérieure est fondamentalement constituée par des tendances, ou plutôt des latences (...) prêtes à s'éveiller pour entrer en action (Huyghe, Dialog. avec visible, 1955, p. 242).V.
disposition ex. 5.
♦ [Avec compl. prép.] Tendance à.Tendance à l'autodestruction, à la dépression, à l'émancipation, à la neurasthénie, au suicide; tendance au moindre effort. Je me suis découvert des tendances à la délation (Frapié, Maternelle, 1904, p. 58).Prédominance de l'imagination et de la tendance au rêve (Mounier, Traité caract., 1946, p. 122).
− [P. oppos. à tendance à « dynamisme mental indifférencié » (d'apr. Morf. Philos. 1980)] Tendance vers. Activité spécifiée orientée vers (un objet déterminé) ((d'apr. Morf. Philos. 1980)). La vie et la ferveur et la tendance vers, créent l'ordre. Mais l'ordre ne crée ni vie, ni ferveur, ni tendance vers (Saint-Exup., Citad., 1944, p. 806).Il n'y a de milieu que de comme il n'y a de tendance que vers (Mounier, Traité caract., 1946, p. 73).Tendance vers Aspiration. Sa tendance continuelle vers Dieu, son avidité d'être toute à lui et de lui tout immoler (Goncourt, MmeGervaisais, 1869, p. 246).
− PSYCHANAL. Synon. de pulsion.Nous voulons parler du conflit de deux tendances et du refoulement de l'une d'elles, lequel refoulement réagit précisément par l'effet de l'acte manqué (Freud, Introd. psychanal., trad. par S. Jankélévitch, 1959 [1922], p. 83).Des « mécanismes » qui altèrent et déguisent les désirs et les tendances refoulées (Ricœur, Philos. volonté, 1949, p. 371).
− MÉTAPHYS. ,,Caractère fondamental d'un être qui sous-tend toutes les autres tendances; ex. le conatus de Spinoza ou effort de l'être pour persévérer dans son être, le vouloir-vivre de Schopenhauer, la volonté de puissance de Nietzsche, etc.`` (Morf. Philos. 1980).